Série de revers pour le gouvernement, l’enveloppe des crédits alloués à l’UE supprimée, un bras d’honneur esquissé par l’écologiste Sandrine Rousseau à l’encontre du RN… les débats sur le budget 2025 ont viré au baroque vendredi à l’Assemblée, laissant désabusée une partie du camp gouvernemental.Une enveloppe de 23 milliards d’euros qui saute ? C’est le résultat d’un bras de fer parlementaire entre le Rassemblement national et ses adversaires à l’Assemblée, qui a fini par supprimer du texte le prélèvement de l’Etat dédié à l’Union européenne.Le RN venait de décrocher de justesse par amendement un rabot de 5 milliards d’euros sur ces crédits. Pris de court, le reste de l’Assemblée s’est divisée : la gauche et quelques centristes ont fait rejeter l’article, tandis que les macronistes se sont pour la plupart abstenus.Tout cela sur fond de polémique dans l’hémicycle, le RN Bryan Masson accusant l’écologiste Sandrine Rousseau d’avoir fait un bras d’honneur. Celle-ci a reconnu avoir “entamé” le geste et présenté ses “excuses à l’ensemble des députés”.L’enveloppe supprimée du projet de loi de finances pourrait toutefois être réintroduite au gré de la navette parlementaire ou d’un recours au 49.3. Et le gouvernement aura fort à faire, plusieurs articles ayant été supprimés par les oppositions, voire avec le soutien de membres de la coalition gouvernementale. En fin d’après-midi, les députés ont ainsi retoqué celui qui autorisait le gouvernement à taxer l’électricité à un niveau supérieur à la période d’avant crise énergétique.Bercy, qui veut ainsi mettre fin au bouclier tarifaire mis en place pendant la crise inflationniste, promet au final une baisse de 9% du tarif règlementé en raison de la diminution du coût de l’énergie.Mais une coalition des oppositions, et les députés Droite républicaine (ex-LR), pourtant alliés du gouvernement Barnier, ont invoqué le risque pour les factures des usagers et le manque de marge de manoeuvre laissé au Parlement pour contrôler la hausse.- “Revoir la copie” -Plus tôt ce matin, les oppositions avaient déjà supprimé d’autres articles, comme celui prévoyant une réforme du tarif préférentiel d’accès à l’électricité nucléaire, dit Arenh, qui disparaîtra fin 2025.Le tout avec une confortable majorité face à une quarantaine de membres de la coalition gouvernementale.”Personne ne se sent respecté par le Premier ministre donc personne ne fait d’effort”, constate un collaborateur parlementaire au groupe Ensemble pour la République. “C’est la perspective du 49.3 qui démotive les troupes”, regrette un député du camp macroniste.Si les députés ont supprimé la taxe sur l’électricité, ils en ont ajouté une et non des moindres contre l’avis du gouvernement : un impôt sur le patrimoine des milliardaires. Porté par LFI, ce nouvel impôt irait taxer 2% de la fraction supérieure de patrimoine d’un foyer qui dépasserait le milliard d’euro. Une mesure qui irait “ponctionner 13 milliards” sur le patrimoine des contribuables concernés, a critiqué le ministre du Budget Laurent Saint-Martin, y voyant “le meilleur moyen de faire fuir ceux qui peuvent investir dans notre pays”.Environ 2.000 amendements restaient à examiner sur la partie recettes du PLF en début de soirée. Son examen doit théoriquement se terminer samedi soir, avant un vote solennel prévu mardi, si tous les amendements sont étudiés.D’ici là, le gouvernement pourrait aussi recourir au 49.3, voire renvoyer la suite de l’examen à début novembre. Ce qui rapprocherait les débats d’une barre fatidique des 40 jours au terme desquels le projet de loi pourrait passer directement au Sénat.”Je veux laisser le débat se poursuivre”, a redit vendredi Michel Barnier en déplacement dans le Rhône.Le gouvernement a aussi connu un revers sur son projet de budget de la Sécurité sociale, rejeté à l’unanimité en commission, avant son arrivée dans l’hémicycle lundi. Plusieurs mesures gouvernementales ont été repoussées, y compris par ses soutiens à l’Assemblée (refonte des cotisations patronales, gel des pensions de retraite). “Il n’y a pas de pilote dans l’avion”, a ironisé Jérôme Guedj (PS). “Pour des raisons différentes, les groupes se sont rejoints sur le non-vote”, a nuancé la macroniste Stéphanie Rist, jugeant qu’il “faut revoir la copie”.