Drogues: la route, nouvelle voie d’acheminement de la cocaïne en France

Esquivant des contrôles resserrés dans les ports européens, le trafic de cocaïne  emprunte de plus en plus la voie routière depuis l’Espagne, avec des saisies “exponentielles” en Nouvelle-Aquitaine, symbole pour les enquêteurs d’un nouveau mode opératoire du narcobanditisme.Selon l’Office antistupéfiants (Ofast), les quantités de cocaïne saisies par les autorités françaises, Marine nationale comprise, ont déjà dépassé le record de 2024: plus de 70 tonnes entre janvier et septembre contre 54 sur toute l’année dernière et 23 la précédente – déjà un record à l’époque.Avec une nouvelle voie d’accès: les routes venant d’Espagne.”On a une réorientation logistique vers la façade atlantique via la côte ibérique”, déclare à l’AFP le commissaire divisionnaire Jean-René Personnic, patron du service interdépartemental de la police judiciaire (SIPJ) de Bordeaux, qui évoque un “afflux massif”.”On a fait de très grosses saisies de cocaïne, qui me laissent penser qu’on a peut-être un changement de flux”, confirme le général Tony Mouchet, commandant de la région de gendarmerie de Nouvelle-Aquitaine.Même si les ports restent l’accès privilégié de la cocaïne (78% des prises françaises en 2024), les douanes soulignent n’avoir “jamais saisi autant de cocaïne sur la route”.”Des saisies par centaines de kilos contre des dizaines auparavant”, note Corinne Cléostrate, sous-directrice des affaires juridiques et de la lutte contre la fraude au sein des douanes françaises.Cette mutation s’explique par des “mesures de sécurité renforcées” dans des ports comme Le Havre, Anvers ou Rotterdam, qui ont poussé les organisations criminelles à “modifier leur mode opératoire”, analyse-t-elle.- “Tsunami blanc” -À Bordeaux, le parquet de la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) confirme une “croissance exponentielle du trafic de cocaïne entre l’Espagne et la France par voie terrestre”.De janvier à septembre, les douaniers ont saisi près de 1,8 tonne de cocaïne en Nouvelle-Aquitaine (contre 37 kg en 2023 et 360 kg en 2024), dont 600 kg à un péage dans deux camions arrivant d’Espagne et 772 kg dans une cache aménagée à bord d’un poids lourd à la fin de l’été.Symptôme de ce “tsunami blanc” depuis la pandémie de Covid-19, “la perte de matière est intégrée dans le business plan” du narcobanditisme, constate le général Tony Mouchet.”Il y a quelques années, 1,4 tonne de cocaïne, c’était surveillé (par les trafiquants). On avait des voitures ouvreuses, etc… Aujourd’hui, ça se balade comme ça”, s’étonne-t-il.La production mondiale de cocaïne, concentrée en Amérique du Sud, n’a jamais été aussi élevée avec 3.700 tonnes en 2023, soit un millier de plus qu’en 2022 et environ quatre fois plus qu’au début des années 2010, selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime.- Caches sophistiquées -“La saturation des marchés nord-américains fait que le prix de la cocaïne a baissé”, relève Corinne Cléostrate. “Donc (les trafiquants) ont tourné leur regard vers le marché européen”, avec des méthodes “très industrielles”.La responsable décrit des “caches aménagées très sophistiquées” dans des poids lourds, utilitaires et fourgonnettes, d’un niveau d’usinage “impressionnant”.En France, la demande de cocaïne n’a jamais été aussi forte: 1,1 million de personnes en ont consommé au moins une fois en 2023, selon l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives.Le prix au gramme, en outre, a baissé: 58 euros en 2024 contre 66 euros en 2023, d’après l’Ofast, accroissant la concurrence parmi les bandes criminelles.”Le produit est devenu accessible à des organisations qui, avant, travaillaient sur du cannabis”, relève Jean-René Personnic, évoquant un marché “très lucratif”. “La cocaïne est extrêmement rémunératrice. Elle suscite des convoitises puissantes qui induisent des actes violents prémédités sur fond de rivalités”.Et cet afflux “considérable” de poudre blanche s’observe sur les points de deal à Bordeaux: “Là où on saisissait auparavant très majoritairement du cannabis, aujourd’hui, nous avons autant de cocaïne que de cannabis”, confirme le procureur Renaud Gaudeul.”Pour la première fois, depuis le début de l’année, nous avons eu plus de morts sur la route à cause des stupéfiants qu’à cause de l’alcool ici en Gironde”, déplore le magistrat, qui prévient: “Le fléau numéro un, c’est la drogue.”

“Une terre sans lois”: en Cisjordanie, des Bédouins fuient le harcèlement de colons

Ahmed  Kaabneh s’était juré de rester sur ses terres, envers et contre tout. Mais lorsque de jeunes colons israéliens se sont installés à 100 mètres de chez lui, ce Bédouin n’a pas eu le choix.Dans le centre de la Cisjordanie occupée, de nombreux membres de la communauté bédouine d’al-Hathrura sont déjà partis, poussés à la fuite par le harcèlement incessant de colons juifs.Aujourd’hui, le petit village de maisons en bois et métal de la communauté bédouine est désert.”C’est très difficile de quitter un endroit où vous avez vécu pendant 45 ans, quasiment toute une vie”, raconte M. Kaabneh, venu s’installer avec sa famille dans une maison de fortune au milieu des collines rocailleuses de Jéricho.”Mais que faire ? Ils sont forts et nous sommes faibles, nous n’avons aucun pouvoir”.Israël occupe la Cisjordanie depuis 1967. Hormis Jérusalem-Est, occupée et annexée par Israël, plus de 500.000 Israéliens y vivent aujourd’hui, dans des colonies considérées comme illégales par l’Onu au regard du droit international, parmi quelque trois millions de Palestiniens.Depuis l’attaque sans précédent du Hamas palestinien en Israël le 7 octobre 2023, la violence de certains colons, notamment ceux installés dans des “avant-postes” illégaux selon la loi israélienne, s’est accrue et leurs attaques contre les communautés locales se multiplient.Quelque 3.200 Palestiniens issus de communautés bédouines ont été contraints de quitter leurs maisons depuis octobre 2023, selon le Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l’ONU (Ocha).Octobre 2025 a été le mois le plus violent depuis que les Nations unies ont commencé à recenser les violences des colons en 2006.Les agresseurs ne sont quasiment jamais traduits en justice, relèvent les ONG qui recensent les incidents.En novembre, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu avait dénoncé les agissements d’une “poignée d’extrémistes qui ne représentent pas les colons en Judée-Samarie (la Cisjordanie, ndlr)”.- “Terrifiant” -Ahmed Kaabneh, quatre de ses frères et leurs familles vivent désormais à 13 kilomètres de leur village, dans des maisons en métal qu’ils ont construites. “Nous sommes dans un endroit où nous n’avons jamais vécu, c’est difficile”, soupire le quadragénaire.L’AFP lui avait rendu visite quelques semaines avant son départ forcé. Deux colons surveillaient le hameau depuis une colline surplombant la route poussiéreuse menant au hameau bédouin.Des caravanes et un drapeau israélien marquent l’emplacement de l’avant-poste des colons, installé récemment, comme plusieurs autres dans la région, où les villages locaux sont désormais déserts.”C’est une situation terrifiante”, racontait alors M. Kaabneh, décrivant un harcèlement quotidien et un grignotage constant du territoire par des colons.”Ils crient toute la nuit, jettent des pierres… Ils nous empêchent de dormir la nuit et de circuler librement le jour”, disait-il.- “Une terre sans lois” – Moins de trois semaines plus tard, seuls des activistes d’ONG et un vieux chat se faufilent dans les vestiges du village déserté, au milieu de vélos d’enfants et de chaussures abandonnés, illustrant un départ précipité.”Nous sommes ici pour garder un oeil sur les propriétés, parce que de nombreux endroits abandonnés sont souvent pillés par des colons”, explique Sahar Kan-Tor, un militant de l’organisation israélo-palestinienne de coexistence Standing Together.Au même moment, on pouvait voir des colons installer un canapé et une table à l’endroit où ils avaient édifié leur cabane d’avant-poste, sur la colline.”Ils profitent du chaos”, lance M. Kan-Tor.”Dans un sens, c’est une terre sans lois. Il y a bien des autorités dans la zone, mais aucune règle n’est jamais, ou seulement très rarement, appliquée”.Les colons agissent “avec l’appui du gouvernement israélien et de l’armée”, accusent les ONG israéliennes Peace Now et Kerem Navot.Certains ministres du gouvernement israélien sont eux-mêmes des colons, comme le ministre des Finances d’extrême droite Bezalel Smotrich, partisan de l’annexion de la Cisjordanie.La colonisation s’est poursuivie sous tous les gouvernements israéliens, de gauche comme de droite depuis 1967, et s’est nettement intensifiée sous l’exécutif actuel, en particulier depuis le début de la guerre à Gaza déclenchée le 7 octobre 2023 par l’attaque sans précédent du Hamas sur Israël.Dans sa nouvelle maison, à l’est de al-Hathrura, Ahmed Kaabneh ne se sent toujours pas en sécurité. Des colons se sont aventurés non loin de chez lui, et surveillent sa communauté depuis une colline.”Ils nous poursuivent partout”, lance-t-il.

Automobile: l’UE va-t-elle assouplir le passage au tout-électrique en 2035?

L’UE va-t-elle assouplir l’interdiction de vendre des voitures neuves à moteur essence ou diesel à partir de 2035? La pression monte sur Bruxelles pour amender cette mesure environnementale majeure, vu la crise aiguë que traverse l’industrie automobile en Europe.La Commission européenne est censée revoir cet objectif le 10 décembre, dans le cadre d’un vaste plan en faveur de l’industrie automobile, mais elle pourrait repousser ses annonces, pour tenter de concilier les multiples demandes des différents États membres, reflétant souvent celles de leurs filières nationales.L’objectif de faire passer les voitures neuves au tout-électrique en 2035 avait été fixé en 2023. C’était l’une des mesures phares du Pacte vert européen, et un jalon crucial dans la difficile quête de la neutralité climatique en 2050.Mais deux ans plus tard, les appels se multiplient, au nom du “pragmatisme”, à revoir ce symbole du Green Deal européen.”Notre secteur a reçu l’objectif le plus contraignant, car à l’époque il était perçu comme l’un des plus faciles à décarboner. Mais c’est en réalité beaucoup plus compliqué, car l’écosystème et la demande des consommateurs n’ont pas pu suivre le rythme” imposé par Bruxelles, a plaidé l’Association des constructeurs automobiles européens (ACEA).Pendant ce temps, les constructeurs chinois s’installent en masse sur le marché européen, avec leurs véhicules électriques bien plus abordables que les modèles “made in Europe”. Résultat, les constructeurs européens craignent une crise sans précédent, si les objectifs de Bruxelles ne sont pas corrigés, avec des licenciements et fermetures d’usines en série.”Le sol se dérobe sous nos pieds”, a résumé début novembre Luc Chatel, président de la Plateforme automobile, qui regroupe les constructeurs et équipementiers français, dénonçant une impasse résultant “d’un choix politique et dogmatique, et non pas technologique”.- “Oubliez les usines de batteries” -Le chancelier Friedrich Merz s’est fait ces dernières semaines le porte-voix des constructeurs, particulièrement puissants en Allemagne et qui appellent depuis des mois Bruxelles à revoir cette obligation.Dans un courrier à la Commission, le chef du gouvernement allemand a réclamé le maintien après 2035 des ventes de voitures neuves à propulsion hybride rechargeables, mais aussi les véhicules équipés de prolongateurs d’autonomie ou de moteurs thermiques “à très haute efficacité”.L’Italie défend quant à elle l’autorisation post-2035 des véhicules neufs roulant aux biocarburants (ou agrocarburants), produits à partir de biomasse. La France, elle, appelle au contraire à dévier le moins possible de la trajectoire vers le tout-électrique, histoire de ne pas compromettre les énormes investissements déjà réalisés par les constructeurs.”Si demain on abandonne l’objectif de 2035, oubliez les usines de batteries électriques européennes”, a lancé le président Emmanuel Macron, à l’issue d’un sommet européen en octobre.La France demande d’ailleurs à l’UE de soutenir à la production de batteries électriques, en plein développement dans le Nord du pays, et propose des obligations de verdissement (c’est-à-dire une électrification imposée) des flottes professionnelles avec des véhicules européens (pour ne pas favoriser les constructeurs chinois).Mais les Allemands ne sont pas favorables au verdissement des flottes.”Electrifier les flottes d’entreprises à 100%, c’est faire revenir par la fenêtre l’interdiction des véhicules à moteur thermique”, a ainsi dénoncé cette semaine le patron de BMW, Oliver Zipse, de passage à Bruxelles.L’ONG spécialisée Transport & Environment, appelle elle à ne surtout pas accorder d’exemption aux biocarburants.”Ce serait une terrible erreur”, prévient Lucien Mathieu, un de ses responsables, pointant leur mauvais bilan carbone et leurs effets indirects imprévus, notamment sur la déforestation.

A close-up of a stack of newspapers resting on a desk, symbolizing information and media.

Automobile: l’UE va-t-elle assouplir le passage au tout-électrique en 2035?

L’UE va-t-elle assouplir l’interdiction de vendre des voitures neuves à moteur essence ou diesel à partir de 2035? La pression monte sur Bruxelles pour amender cette mesure environnementale majeure, vu la crise aiguë que traverse l’industrie automobile en Europe.La Commission européenne est censée revoir cet objectif le 10 décembre, dans le cadre d’un vaste plan en faveur de l’industrie automobile, mais elle pourrait repousser ses annonces, pour tenter de concilier les multiples demandes des différents États membres, reflétant souvent celles de leurs filières nationales.L’objectif de faire passer les voitures neuves au tout-électrique en 2035 avait été fixé en 2023. C’était l’une des mesures phares du Pacte vert européen, et un jalon crucial dans la difficile quête de la neutralité climatique en 2050.Mais deux ans plus tard, les appels se multiplient, au nom du “pragmatisme”, à revoir ce symbole du Green Deal européen.”Notre secteur a reçu l’objectif le plus contraignant, car à l’époque il était perçu comme l’un des plus faciles à décarboner. Mais c’est en réalité beaucoup plus compliqué, car l’écosystème et la demande des consommateurs n’ont pas pu suivre le rythme” imposé par Bruxelles, a plaidé l’Association des constructeurs automobiles européens (ACEA).Pendant ce temps, les constructeurs chinois s’installent en masse sur le marché européen, avec leurs véhicules électriques bien plus abordables que les modèles “made in Europe”. Résultat, les constructeurs européens craignent une crise sans précédent, si les objectifs de Bruxelles ne sont pas corrigés, avec des licenciements et fermetures d’usines en série.”Le sol se dérobe sous nos pieds”, a résumé début novembre Luc Chatel, président de la Plateforme automobile, qui regroupe les constructeurs et équipementiers français, dénonçant une impasse résultant “d’un choix politique et dogmatique, et non pas technologique”.- “Oubliez les usines de batteries” -Le chancelier Friedrich Merz s’est fait ces dernières semaines le porte-voix des constructeurs, particulièrement puissants en Allemagne et qui appellent depuis des mois Bruxelles à revoir cette obligation.Dans un courrier à la Commission, le chef du gouvernement allemand a réclamé le maintien après 2035 des ventes de voitures neuves à propulsion hybride rechargeables, mais aussi les véhicules équipés de prolongateurs d’autonomie ou de moteurs thermiques “à très haute efficacité”.L’Italie défend quant à elle l’autorisation post-2035 des véhicules neufs roulant aux biocarburants (ou agrocarburants), produits à partir de biomasse. La France, elle, appelle au contraire à dévier le moins possible de la trajectoire vers le tout-électrique, histoire de ne pas compromettre les énormes investissements déjà réalisés par les constructeurs.”Si demain on abandonne l’objectif de 2035, oubliez les usines de batteries électriques européennes”, a lancé le président Emmanuel Macron, à l’issue d’un sommet européen en octobre.La France demande d’ailleurs à l’UE de soutenir à la production de batteries électriques, en plein développement dans le Nord du pays, et propose des obligations de verdissement (c’est-à-dire une électrification imposée) des flottes professionnelles avec des véhicules européens (pour ne pas favoriser les constructeurs chinois).Mais les Allemands ne sont pas favorables au verdissement des flottes.”Electrifier les flottes d’entreprises à 100%, c’est faire revenir par la fenêtre l’interdiction des véhicules à moteur thermique”, a ainsi dénoncé cette semaine le patron de BMW, Oliver Zipse, de passage à Bruxelles.L’ONG spécialisée Transport & Environment, appelle elle à ne surtout pas accorder d’exemption aux biocarburants.”Ce serait une terrible erreur”, prévient Lucien Mathieu, un de ses responsables, pointant leur mauvais bilan carbone et leurs effets indirects imprévus, notamment sur la déforestation.

A Arica, dans le nord du Chili, insécurité et migration dominent avant le second tour

A Arica, grande ville frontalière du nord du Chili, des habitants racontent un quotidien marqué par l’insécurité et l’arrivée de migrants en situation irrégulière, deux thèmes qui dominent le second tour de la présidentielle du 14 décembre.Le scrutin oppose la candidate de gauche Jeannette Jara à José Antonio Kast, figure de l’extrême droite qui promet d’expulser les 337.000 étrangers en situation irrégulière dans le pays. Favori dans les sondages, l’ultraconservateur deviendrait, en cas de victoire, le premier dirigeant d’extrême droite depuis la fin de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990).Du fait de sa situation frontalière, Arica est en première ligne des débats nationaux. A une dizaine de kilomètres de la ville de 250.000 habitants, en plein désert d’Atacama, se trouve l’un des principaux points de passage du pays. Depuis 2020, de nombreux migrants, surtout vénézuéliens, contournent cependant ce poste en empruntant des chemins clandestins : ils étaient 200 en 2018 à Arica, contre 5.000 en 2023, selon le Service des migrations chilien.Ces arrivées, en même temps que celle de bandes criminelles venues de l’étranger, ont mis fin au calme de la ville bordée par le Pacifique, racontent des habitants à l’AFP.”Avant, on pouvait aller à la plage la nuit et rentrer à pied. Maintenant, ce n’est plus possible”, affirme Paloma Cortés, une vendeuse de 27 ans.Dans son quartier, des membres de la redoutée bande vénézuélienne Tren de Aragua ont investi des logements abandonnés au sommet d’une colline.”Avant, on te volait tes affaires. Maintenant, on te frappe, on te poignarde, on t’envoie à l’hôpital”, dit-elle. Arica a connu une explosion de la criminalité : son taux est passé de 5,7 homicides pour 100.000 habitants en 2019, à 17,5 en 2022, presque trois fois la moyenne nationale. “Les assassinats commandités, les enlèvements, ce sont des choses qui n’existaient pas”, confirme Alfonso Aguayo, un agent de sécurité de 49 ans. – “Tout le monde paie” -En 2022, la police a démantelé la direction locale du Tren de Aragua et perquisitionné les logements que l’organisation occupait. Dans l’un d’eux, ont été découverts un centre de torture et les restes de trois corps. En mars, la justice a condamné 31 Vénézuéliens et trois Chiliens de la bande criminelle à des peines totalisant près de 560 ans de prison. Le taux d’homicides est retombé à 9,9 l’an dernier, mais reste supérieur à la moyenne nationale de 6,6.Lors du premier tour le 16 novembre, les candidats de droite ont obtenu à Arica près des trois quarts des suffrages, menés par l’économiste Franco Parisi, partisan de l’expulsion des migrants en situation irrégulière, mais aussi de l’installation de mines antichars à la frontière.Derrière ce vote motivé par la peur et l’insécurité, certains habitants rappellent cependant que les migrants sont aussi devenus une main-d’oeuvre indispensable.L’insécurité “n’a rien à voir avec l’immigration, mais avec la bonté ou la méchanceté des personnes”, estime Fermin Burgos, un professeur à la retraite de 75 ans, dont le fils emploie deux Vénézuéliennes dans son restaurant. “Elles sont en situation irrégulière, mais elles sont excellentes”, dit-il.Au Chili, les migrants en situation irrégulière ont accès aux soins de santé et leurs enfants à l’école publique. Beaucoup travaillent dans le commerce informel ou comme livreurs.La Vénézuélienne Fernair Rondo, 35 ans, installée depuis sept ans dans le pays, regrette l’évolution du climat. Avant, “il n’y avait pas cette xénophobie (…) c’était plus sûr, mais à cause de certains, tout le monde paie et on étiquette les Vénézuéliens comme mauvais”, dit cette vendeuse dans un magasin de spiritueux. Dans certains secteurs, les migrants sont même devenus indispensables : 5,8% des médecins du pays sont étrangers, selon l’autorité de régulation. Une “contribution” essentielle, selon Claudia Villegas, directrice de la santé municipale d’Arica. “Dans des zones comme la nôtre, qui sont extrêmes, nous ne pouvons pas répondre à la demande de médecins avec les seuls diplômés de la région”, affirme-t-elle.

L’art-thérapie comme alternative à “la machine psychiatrique industrielle”

Dans le salon d’un parfait inconnu à Marseille, Yann Klimenko donne un dernier coup de pinceau à sa toile avant d’achever sa séance d’art-thérapie. “C’est plus sympathique qu’un médicament”, témoigne le quadragénaire atteint de schizophrénie qui y voit une alternative bienvenue aux soins institutionnels.Autour de la table, il y a aussi Sasha* (prénom d’emprunt), 22 ans, pour qui participer à une activité artistique hors les murs d’une institution médicale “fait du bien”. Elle comptabilise plus d’une vingtaine de tableaux depuis un an, dont certains décorent les intérieurs de ses proches.  Pour Yann, qui a connu de longues périodes d’internement, sortir, créer et le soutien entre personnes partageant son vécu sont autant d'”avancées dans le prendre soin”.”Je ne suis pas dans un hôpital, dans ce que j’appelle la machine psychiatrique industrielle.”Ce groupe thérapeutique se déroule sous la forme d'”une promenade dans Marseille”, explique l’artiste Arnaud Deschin de Beir, qui a fondé l’association Aigle Abeilles, dédiée à l’intégration sociale par les arts plastiques. Deux fois par mois, ce diplômé des Beaux-Arts formé à l’art-thérapie propose des expositions, des balades architecturales ou de se faire inviter chez des particuliers pour peindre.Ce jour-là, c’est Cyril Lahlou qui met à disposition son élégant appartement doté d’un jardin luxuriant. “Je trouve intéressant ce partage. Cela permet une meilleure appréhension de la maladie mentale, d’enlever les préjugés”, explique le régisseur, enclin à renouveler l’expérience. La peinture ou tout autre média artistique est utilisé “pour sortir de la marginalité, pour ancrer les patients sur du réel. Le plus important n’est pas le résultat mais tout le processus pour en arriver là”, explique l’art-thérapeute qui a choisi cette discipline après avoir été diagnostiqué d’un trouble de déficit de l’attention (TDAH) à 50 ans. L’artiste plasticien regrette d’avoir trop longtemps “erré” sans savoir ce dont il souffrait.La santé mentale a été déclarée “grande cause nationale” en 2025, permettant de briser un silence autour du sujet. Le gouvernement vient de décider de la prolonger en 2026, les acteurs du secteur réclamant désormais des mesures concrètes.Dans sa capacité à contourner les limitations du langage verbal, “l’art-thérapie est bénéfique”, constate le Dr Jean-Luc Martinez, pédopsychiatre et coordinateur d’une unité d’hospitalisation pour jeunes adultes (18-25 ans) à la clinique des Trois Cyprès en périphérie de Marseille.- “Pas une fatalité” -Dans la cité phocéenne, les besoins en psychiatrie “explosent mais les moyens ne suivent pas”, selon le syndicat Sud Santé.La crise de la psychiatrie publique, qui touche l’ensemble du territoire, est “particulièrement aiguë dans les quartiers populaires de la ville, ceux-là mêmes où les inégalités sociales sont les plus marquées et où la précarité pèse lourdement sur la santé mentale des habitants”, développe le syndicat.Les professionnels interrogés constatent l’étiolement de la psychiatrie avec la fermeture de lits, des délais d’accès aux soins qui s’allongent, des structures de proximité saturées ou inexistantes, des agents à bout et in fine “des usagers trop souvent abandonnés à leur détresse”.La ville a connu plusieurs incidents violents impliquant des personnes souffrant de troubles psychiatriques non prises en charge.”Ce n’est pas une fatalité d’avoir des problèmes psys”, affirme Matthieu Saliceti, 25 ans. Dans son studio de musique à Aubagne, l’entrepreneur accueille une fois par semaine de jeunes adultes suivis par la clinique des Trois Cyprès où lui même a séjourné à ses 18 ans. Au programme: écriture de morceaux et enregistrement.Un fois installée dans la cabine, Zou, 22 ans, exprime sa “violence”, son “mal-être dans la société”. “Je me sens libre. C’est plus simple de partager un texte que de parler à mon psychiatre” et “la santé mentale ne se guérit pas qu’avec les médicaments”, ajoute l’étudiante.L’institution défend “une psychiatrie tournée vers l’extérieur pour aider les jeunes à retrouver le goût du monde qui les entoure et à reprendre confiance en eux”, détaille Céline Giner, éducatrice qui accompagne le groupe. L’autre enjeu est de prévenir les hospitalisations à répétition.

Ukrainiens et Américains poursuivent leurs discussions en Floride

Négociateurs ukrainiens et américains se retrouvent samedi en Floride pour leur troisième jour de discussions sur le plan de Washington visant à mettre fin à la guerre avec la Russie, au moment où les forces russes poursuivent leur avancée sur le front et leurs bombardements nocturnes.”Les deux parties sont convenues que tout progrès réel vers …

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