L’ouragan Melissa s’intensifie, poursuit sa route meurtrière dans les Caraïbes

L’ouragan Melissa, renforcée dimanche en catégorie 4 sur une échelle qui en compte 5, poursuit sa route meurtrière dans les Caraïbes, menaçant la Jamaïque et l’île d’Hispaniola, partagée entre la République dominicaine et Haïti, où elle a causé la mort de quatre personnes.Le Centre national des ouragans (NHC) des Etats-Unis, basé à Miami en Floride, a indiqué dimanche que Melissa s’était intensifiée pour devenir un ouragan de catégorie 4, avec des vents d’environ 225 kilomètres par heure et une vitesse de 8 km/h.La tempête devrait provoquer des inondations et des glissements de terrain “potentiellement mortels et catastrophiques” dans certaines régions de la Jamaïque et du sud d’Hispaniola, a indiqué le NHC, prévoyant une “intensification rapide et continue” suivie “de fluctuations d’intensité”.Melissa devrait devenir “un ouragan majeur lorsqu’elle touchera terre en Jamaïque lundi soir ou mardi matin, et dans le sud-est de Cuba tard mardi”, selon le NHC.Melissa se trouvait dimanche à environ 190 kilomètres au sud-est de Kingston, la capitale jamaïcaine, et à 450 kilomètres au sud-ouest de Guantanamo, à Cuba.Avant même son passage en catégorie 4, Melissa avait déjà fait trois morts en Haïti et un en République dominicaine, où un adolescent est porté disparu, selon les autorités locales.”L’eau a envahi plus de la moitié de la maison”, a témoigné auprès de l’AFP Angelita Francisco, femme au foyer de 66 ans habitant à Saint-Domingue, la capitale dominicaine.- “impuissants” -“On se sent impuissants, sans rien pouvoir faire, à part fuir en laissant tout”, a-t-elle dit, secouée par des sanglots.Neuf des 31 provinces du pays sont en vigilance rouge pour des risques d’inondations subites, des crues et des glissements de terrain.Melissa pourrait apporter de 38 à 76 cm de pluie dans certaines régions du sud d’Hispaniola et de la Jamaïque, et des zones isolées pourraient recevoir jusqu’à 102 cm, selon le NHC.Vendredi, le Premier ministre jamaïcain Andrew Holness a exhorté les habitants des zones sujettes aux inondations à tenir compte des avertissements et à se préparer à évacuer.”Si vous vivez dans une zone déjà inondée par le passé, attendez-vous à ce qu’elle le soit à nouveau”, a-t-il déclaré.L’aéroport international Norman Manley, qui dessert Kingston, a annoncé sa fermeture samedi soir et a demandé au public de ne pas s’y rendre.- Ports fermés en Jamaïque -L’agence gouvernementale Jamaica Information Service a indiqué samedi que tous les ports maritimes étaient également fermés.Les pluies liées à Melissa ont déjà submergé plusieurs routes de la capitale jamaïcaine, Kingston, selon des images diffusées par les médias locaux.Les habitants du sud-ouest d’Haïti doivent entamer “immédiatement les préparatifs nécessaires pour protéger leur vie et leurs biens”, a averti le NHC, prévenant que la tempête pourrait causer “d’importants dégâts aux infrastructures et potentiellement isoler des communautés pendant une période prolongée”.Le dernier ouragan majeur à avoir touché la Jamaïque était Béryl, début juillet 2024. Anormalement puissant pour cette période de l’année, il avait provoqué de fortes pluies et des vents violents, faisant au moins quatre morts sur l’île.Melissa a constitué la 13e tempête tropicale de la saison dans l’Atlantique, qui s’étend de début juin à fin novembre.

Hurricane Melissa strengthens as it crawls toward Jamaica

Hurricane Melissa was cutting a deadly path through the Caribbean on Sunday, strengthening into a Category 4 storm as it crawled along a worryingly slow course toward Jamaica and the island of Hispaniola.Melissa has already been blamed for three deaths in Haiti this week, as its outer bands brought heavy rains and landslides to the impoverished nation.In the Dominican Republic, which shares the island of Hispaniola with Haiti, a 79-year-old man was found dead after being swept away in a stream, local officials said Saturday. A 13-year-old boy was missing.”You feel powerless, unable to do anything, just run away and leave everything behind,” Angelita Francisco, a 66-year-old homemaker who fled her neighborhood in the Dominican Republic, told AFP through tears.Floodwater had inundated her house, causing her refrigerator to float away as trash bobbed around the home.The US National Hurricane Center (NHC) said on Sunday that Melissa had intensified into a Category 4 hurricane, packing winds of about 140 miles (225 kilometers) per hour and moving at 5 mph.The storm was expected to set off “life-threatening and catastrophic” flooding and landslides in parts of Jamaica and southern Hispaniola, the NHC said, forecasting “continued rapid intensification… followed by fluctuations in intensity.”Melissa was “expected to be a major hurricane when making landfall in Jamaica Monday night or Tuesday morning, and southeastern Cuba late Tuesday,” it added.As of Sunday, Melissa was about 120 miles (around 190 kilometers) southeast of Jamaica’s capital Kingston, and 280 miles (450 kilometers) southwest of Guantanamo, Cuba.The Dominican Republic’s emergency operations center said nine of 31 provinces were on red alert Saturday due to risk of flash floods, rising rivers and landslides.Melissa could bring 15 to 30 inches (38 to 76 cm) of rain in portions of southern Hispaniola and Jamaica, with isolated areas expected to receive as much as 40 inches, the NHC said.Jamaican Prime Minister Andrew Holness on Friday urged residents of flood-prone areas to heed warnings and be prepared to evacuate.”If you live in an area that was flooded before, expect that it will flood again,” he said.Norman Manley International Airport, which serves Kingston, announced it would close on Saturday evening and urged the public not to travel there.The Jamaica Information Service government agency said on Saturday that all seaports had been closed.Melissa is the 13th named storm of the Atlantic hurricane season, which runs from early June to late November.The last major hurricane to impact Jamaica was Beryl in early July 2024 — an abnormally strong storm for the time of year.Beryl brought downpours and strong winds to Jamaica as it moved past the island’s southern coast, leaving at least four people dead.

Pied à pied, un cordonnier préserve le glorieux passé d’Hollywood

Dans son atelier de Los Angeles, Chris Francis empile les boîtes à chaussures du sol au plafond. A l’intérieur, des moules des pieds des plus grandes stars d’Hollywood, confectionnés au cours de plus d’un demi-siècle pour leur fabriquer des souliers sur mesure.”Il y a un peu de tout le monde ici”, sourit le cordonnier, au milieu de ces archives inestimables.Sur les boîtes jaunies par le temps, on retrouve tout le gratin de la Cité des Anges: Elizabeth Taylor fait ainsi du pied à Peter Fonda, Tom Jones et Harrison Ford.Dans une autre pile, Sharon Stone marche sur Liza Minnelli et Goldie Hawn. Plus loin, on trouve aussi les pieds de Sylvester Stallone et Arnold Schwarzenegger.M. Francis a acquis cette collection improbable quelques années après la mort en 2008 de Pasquale Di Fabrizio, un Italien connu à Los Angeles comme “le cordonnier des stars”.”Di Fabrizio a travaillé pour tout le monde, des propriétaires de casinos aux acteurs, en passant par les artistes de Las Vegas, Broadway, Hollywood, le cinéma, bref, tous ceux qui se produisaient sur scène entre les années 1960 et 2008″, raconte à l’AFP M. Francis.Dans certaines boîtes, on retrouve donc des autographes et des dédicaces. D’autres, comme celles de Sarah Jessica Parker ou de la chanteuse de “La Mélodie du bonheur”, Julie Andrews, contiennent des dessins provenant de productions télévisées ou cinématographiques.- Nostalgie -Avec son industrie créative vorace et son besoin constant de se démarquer des autres, Hollywood était autrefois un endroit rêvé pour un cordonnier, selon M. Francis.”Les célébrités se vantaient du prix qu’elles avaient payé pour une paire de chaussures et voulaient quelque chose que personne d’autre n’avait”, explique-t-il en sortant une boîte contenant les moules d’Adam West, l’acteur qui a incarné Batman dans la série originale des années 1960.Lui-même a commencé sa carrière dans la couture. Il a décroché son premier contrat après avoir été repéré en train de coudre une veste en cuir sur un banc public.”Ici, à Los Angeles, c’est facile d’être au bon endroit au bon moment”, rit-il.Mais son rêve était de confectionner des chaussures. Alors il a commencé à apprendre seul dans sa cuisine.”Au début, elles étaient assez rudimentaires”, confie-t-il.A la recherche des meilleurs professeurs, il a écumé tout Los Angeles pour trouver un stage pratique. Il a ainsi fini par apprendre le métier auprès de cordonniers arméniens, russes, iraniens ou syriens.”Ils ne disaient rien ou ne parlaient pas très bien anglais. Il fallait donc observer et apprendre, puis apprendre en refaisant les choses encore et encore.”De quoi lui transmettre l’exigence du métier.”Il n’y a pas de place pour l’erreur dans la fabrication de chaussures”, résume-t-il. “Si vous ratez une étape, si vous bâclez un truc, les 20 étapes suivantes pourraient en pâtir. Il faut donc être précis à chaque instant.”- “Chaussures gratuites” -Mais ce savoir-faire méticuleux est de moins en moins apprécié. Là où Burt Reynolds ou Robert De Niro étaient autrefois heureux de débourser des milliers de dollars pour une paire sur mesure, les stars d’aujourd’hui ne se jettent plus aux pieds des artisans.”Je constate que de plus en plus de célébrités veulent des chaussures gratuites, ce qui tue les cordonniers comme moi”, soupire M. Francis, sous ses tatouages et son allure de rockstar.Parfois, il regrette de ne pas avoir écouté certains de ses anciens maîtres.”Ils me disaient de rejoindre un groupe” de musique, raconte-t-il. “Quand j’ai commencé, l’un d’eux m’a dit : +Mais pourquoi tu veux devenir cordonnier ? De nos jours, on peut acheter des chaussures pour 20 dollars.+”A 48 ans, l’artisan voit aujourd’hui certains confrères renoncer à la création de chaussures sur mesure, pour se contenter de réparer les souliers produits en série qui inondent le marché.”En tant que profession, c’est extrêmement difficile de survivre”, conclut-il.

Zohran Mamdani, l’ascension fulgurante d’un outsider

Largement inconnu il y a encore quelques mois, Zohran Mamdani, élu local de la gauche du Parti démocrate issu d’une famille d’intellectuels de la diaspora indienne, pourrait devenir l’un des plus jeunes maires de l’histoire de New York, et le premier musulman.Depuis sa victoire surprise à la primaire de son parti en juin, les New-Yorkais se sont habitués à voir son visage barbu et souriant à la télé, ou reproduit sur les gros badges colorés que ses jeunes supporteurs arborent fièrement dans le métro. Agé de 34 ans, le favori des sondages est né en Ouganda dans une famille d’origine indienne, et vit aux Etats-Unis depuis ses sept ans. Il a été naturalisé américain en 2018.Souvent rappelé à son statut de “nepo baby” (“fils de”), il est l’enfant de Mira Nair, réalisatrice renommée (“Salaam Bombay!”, Caméra d’or à Cannes, “Le mariage des moussons”, Lion d’Or à Venise), et Mahmood Mamdani, professeur d’anthropologie et sciences politiques à l’université Columbia, spécialiste reconnu de l’Afrique.Son parcours est celui d’une certaine jeunesse libérale dorée de New York: lycée d’élite (Bronx High School of Science) puis le Bowdoin College dans le Maine, université connue pour être un bastion progressiste.Sous l’alias Young Cardamom, il tente en 2015 de se lancer dans le rap, influencé notamment par Das Racist, groupe new-yorkais à la fois innovant et potache dont deux des membres sont d’origine indienne, jouant avec les références et les clichés du sous-continent.L’expérience ne dure pas – il se reconnaît lui-même comme “artiste de seconde zone”. Mais lorsqu’il lit que le rappeur Heems (Himanshu Suri) soutient un candidat au conseil municipal, il rejoint sa campagne en tant que militant: le virus de la politique ne le quittera plus.Il devient conseiller en prévention des saisies immobilières, aidant des propriétaires modestes en difficulté financière à éviter de perdre leur logement.-  Campagne à l’ancienne et réseaux -Et c’est à Astoria dans le Queens, quartier creuset des vagues migratoires les plus récentes où il travaille, qu’il est élu en 2020, comme représentant du district à l’Assemblée de l’Etat de New York.Réélu par deux fois, c’est sur le terrain, que ce “socialiste” revendiqué se forge cette image qui va faire sa force: celle d’un musulman progressiste, aussi à l’aise à une marche des fiertés qu’à une rupture du jeûne de l’Aïd.Une image à laquelle il joint un programme en forme de credo: “affordability”, rendre cette ville parmi les plus chères du monde “abordable” pour tous ceux qui ne sont pas riches, c’est-à-dire la majorité de ses quelque 8,5 millions d’habitants. Pour cela, il promet plus de loyers encadrés, des crèches et des bus gratuits, des épiceries de quartier gérées par la ville.Farouche défenseur de la cause palestinienne depuis ses années étudiantes, ses prises de position sur Israël (qualifié de “régime d’apartheid”) et la guerre à Gaza (un “génocide”), lui valent l’hostilité d’une partie de la communauté juive. Pour tenter de rassurer, il n’a eu de cesse ces derniers mois de se montrer ferme contre l’antisémitisme.Énergique opposant à Donald Trump, qui le qualifie de “petit communiste”, Zohran Mamdani est paradoxalement, comme lui, un “outsider” dans un vieux monde politique dont les électeurs ne veulent plus, estime Costas Panagopoulos, professeur en sciences politiques à la Northeastern University.”Il a réussi à rallier le soutien des électeurs insatisfaits, les New-Yorkais frustrés par le statu quo et qui estiment que l’establishment ignore leurs besoins et leurs priorités”, dit-il.Le jeune élu fan de cricket et de football, récemment marié à l’illustratrice américaine Rama Duwaji, a su également mettre à profit ses qualités de militant, avec une campagne de porte-à-porte et de tractage efficace, et une utilisation massive, innovante et souvent drôle, des réseaux sociaux.Pour Lincoln Mitchell, de l’université Columbia, “il a incarné une sorte d’hybride entre une campagne à l’ancienne des années 1970 et une campagne ultra-moderne de 2025”.

Dans la prison californienne de San Quentin, un festival de cinéma derrière les barreaux

Organisé dans une prison tristement célèbre, abritant certains des criminels les plus violents des Etats-Unis, le festival de cinéma de San Quentin n’a rien d’un événement californien ordinaire.Les interviews sur le tapis rouge se déroulent à quelques mètres d’une salle d’exécution où des centaines de condamnés ont été mis à mort.Des meurtriers condamnés prennent place aux côtés de célèbres acteurs et de journalistes pour assister aux projections de films réalisés par leurs codétenus. Parmi ceux-ci se trouve Ryan Pagan, qui purge une peine de 77 ans pour assassinat.”J’ai toujours voulu être acteur. Mais, malheureusement, ce n’est pas la vie que j’ai eue”, confie cet homme, des tatouages sur le haut des bras.Son film “The Maple Leaf”, réalisé derrière les barreaux, est en lice pour le prix du meilleur court métrage. Ryan Pagan, aujourd’hui âgé de 37 ans, était encore adolescent lorsqu’il a commis son crime. Il espère que ses nouveaux talents de réalisateur lui offriront un jour une “passerelle vers Hollywood et l’emploi”.Bien qu’il n’ait pas été récompensé, son film — qui raconte l’histoire d’un groupe d’entraide où des détenus affrontent leur culpabilité et leur honte — a été salué par le jury, notamment composé de la réalisatrice Celine Song (“Past Lives – Nos vies d’avant”) et l’acteur Jesse Williams (“Grey’s Anatomy”).”Pour l’instant, je me contente de faire mon travail et de me reconstruire. Une partie de l’histoire de +The Maple Leaf+ parle de gars comme moi”, explique le détenu.- “Travail exceptionnel” -Plus vieille prison de Californie, San Quentin a été pendant des décennies un établissement de haute sécurité abritant le plus grand couloir de la mort du pays.Elle a été rendue célèbre dans le monde entier par un concert de Johnny Cash en 1969.La prison est depuis devenue un symbole de la réforme pénale en Californie, qui observe un moratoire des exécutions sur décision du gouverneur.Aucune exécution n’y a plus lieu, et les programmes de réinsertion qui y sont proposées incluent notamment des ateliers de production d’un journal, de podcasts et de films. Ces projets permettent aux détenus d’acquérir des compétences professionnelles, sachant que 90% d’entre eux seront libérés un jour.Lancé l’an dernier, le festival leur offre l’opportunité de rencontrer des cinéastes venus de l’extérieur.Sa fondatrice, la dramaturge et scénariste Cori Thomas, est intervenue bénévolement dans la prison pendant des années, et souhaitait montrer à ses pairs d’Hollywood le “travail exceptionnel” réalisé à San Quentin.”Le seul moyen était qu’ils viennent ici pour le voir”, a-t-elle réalisé.Après deux éditions couronnées de succès, le festival sera élargi à une prison pour femmes en 2026.- Vertus cathartiques -La programmation du festival est aussi une occasion pour les détenus d’affronter leur passé. Incarcéré depuis 27 ans, Miguel Sifuentes a été condamné à la perpétuité pour un vol à main armée au cours duquel un policier a été tué.Le tournage du court-métrage “Warning Signs” a été, pour lui, une expérience “thérapeutique” qui l’a “transformé”. Il y joue le rôle d’un détenu qui envisage de se suicider. Des prisonniers qu’il ne connaissait pas sont venus lui parler après avoir vu le film pour se confier sur leurs propres idées suicidaires, assure-t-il.Bien qu’elle soit axée sur la réinsertion, la prison de San Quentin reste un lieu dangereux.”Nous avons eu des agressions où des infirmières ont été blessées par des détenus”, explique ainsi Kevin Healy, qui forme le personnel de l’établissement.Chance Andes, son directeur, affirme toutefois à l’AFP que le festival et la réalisation de films ont des vertus cathartiques et contribuent à “réduire la violence et les tensions à l’intérieur des murs”.Les détenus qui provoquent des bagarres ou enfreignent les règles de la prison perdent ainsi temporairement la possibilité de participer à ces activités.Selon M. Andes, elles favorisent aussi la réinsertion des prisonniers: “Si nous renvoyons des personnes dans la société sans qu’elles aient résolu leurs traumatismes et sans compétences, diplômes ou formation, elles sont plus susceptibles de récidiver et de faire davantage de victimes”, explique-t-il.

A close-up of a stack of newspapers resting on a desk, symbolizing information and media.

Au Kenya, cinq petits villages et une forêt au cœur de la course mondiale aux terres rares

Près de la côte kényane, cinq petits villages et une forêt se retrouvent malgré eux au coeur d’un jeu géostratégique global, impliquant notamment Chine et Etats-Unis, le sol sur lequel ils s’enracinent regorgeant de terres rares.Mrima hill, jolie colline boisée située près de la frontière tanzanienne, voit depuis quelques temps les visiteurs étrangers se succéder. Car d’importantes réserves, notamment de niobium, un minerai utilisé pour renforcer l’acier, s’y trouvent.Le site est petit: environ 3,6 km2 au total. Mais le gisement sur lequel il repose a été évalué en 2013 à 62,4 milliards de dollars (environ 47 milliards d’euros d’alors) par Cortec mining Kenya, une filiale de sociétés anglaises et de l’entreprise canadienne Pacific Wildcat Resources.Alors que la compétition s’accélère globalement pour l’accès aux terres rares, l’ex-ambassadeur par intérim des Etats-Unis au Kenya, Marc Dillard, s’est donc rendu sur place en juin, selon plusieurs villageois interrogés par l’AFP, ce qu’a confirmé la représentation diplomatique américaine à Nairobi.Washington fait de la sécurisation des minerais critiques un élément central de sa diplomatie en Afrique, espérant concurrencer le quasi-monopole de la Chine dans ce secteur stratégique.La Maison Blanche se félicite notamment d’être parvenue à un accord de paix entre le Rwanda et la République démocratique du Congo -un pays extrêmement riche en ressources minières, même si les violences perdurent dans l’est.- “Grosses voitures” -Peu avant la venue du représentant américain, un consortium australien avait fait en avril une offre pour exploiter les terres rares. Des ressortissants chinois ont également récemment tenté de visiter les lieux, où les spéculateurs fonciers affluent, affirme Juma Koja, un gardien de la communauté.”Les gens viennent ici dans de grosses voitures (…), mais nous les refoulons”, assure-t-il à l’AFP, dont une équipe a dans un premier temps également été interdite d’accès à la forêt. “Je ne veux pas que mon peuple soit exploité”, justifie-t-il.Le gardien craint des dommages environnementaux irréversibles, notamment la perte d’arbres indigènes uniques comme la grande orchidée, déjà menacée alors que l’exploitation minière n’a pas encore débuté. “Dans mon coeur, je pleure” à cette pensée, confie-t-il.La forêt luxuriante, riche en plantes médicinales, abrite en outre des sanctuaires sacrés et assure depuis longtemps la subsistance de la population, bien que plus de la moitié de celle-ci vive aujourd’hui dans une pauvreté extrême, selon des données gouvernementales.La communauté locale s’inquiète surtout d’être expulsée du fait de l’exploitation du niobium dont elle ne toucherait rien. “Où nous emmèneront-ils?”, angoisse Mohammed Riko, 64 ans, vice-président de l’Association communautaire de la forêt de Mrima Hill. “Mrima est notre vie.” Le Kenya a imposé en 2019 une interdiction nationale sur les nouvelles licences minières en raison de préoccupations concernant la corruption et la dégradation de l’environnement, interdiction qu’il a progressivement assouplie depuis.La Chine limitant de plus en plus ses propres exportations de terres rares, Nairobi voit désormais des opportunités à saisir.- “Mourir pauvres” -Le ministère des Mines kényan a annoncé cette année des “réformes audacieuses”, notamment des allégements fiscaux et une transparence accrue des licences, visant à attirer les investisseurs et à faire passer le secteur de 0,8% du PIB à 10% d’ici 2030.Mais le Kenya manque de données précises sur ses sols, estime Daniel Weru Ichang’i, professeur retraité de géologie économique à l’Université de Nairobi.”Il existe une vue romantique des mines, qui sont perçues comme un secteur où l’on fait de l’argent facilement. Il faut que nous redescendions sur terre”, observe-t-il.Le corruption, très répandue au Kenya, “rend moins attractif ce secteur, déjà à très haut risque” pour d’éventuels investisseurs, poursuit Daniel Weru Ichang’i.En 2013, le Kenya avait révoqué la licence minière accordée à Cortec Mining Kenya, invoquant des irrégularités environnementales et de licence. L’entreprise affirme de son côté s’être vue sanctionnée pour avoir refusé de payer un pot-de-vin au ministre des Mines de l’époque, ce que celui-ci nie. Elle a perdu son recours devant un tribunal international.Domitilla Mueni, trésorière de l’Association de Mrima Hill, espère malgré tout d’importantes retombées. Elle-même a planté des arbres sur son terrain et l’a cultivé — afin de maximiser les profits au cas où des entreprises minières voudraient le racheter.Et de s’interroger: “Pourquoi devrions-nous mourir pauvres alors que nous avons des minerais?”

Au Kenya, cinq petits villages et une forêt au cœur de la course mondiale aux terres rares

Près de la côte kényane, cinq petits villages et une forêt se retrouvent malgré eux au coeur d’un jeu géostratégique global, impliquant notamment Chine et Etats-Unis, le sol sur lequel ils s’enracinent regorgeant de terres rares.Mrima hill, jolie colline boisée située près de la frontière tanzanienne, voit depuis quelques temps les visiteurs étrangers se succéder. Car d’importantes réserves, notamment de niobium, un minerai utilisé pour renforcer l’acier, s’y trouvent.Le site est petit: environ 3,6 km2 au total. Mais le gisement sur lequel il repose a été évalué en 2013 à 62,4 milliards de dollars (environ 47 milliards d’euros d’alors) par Cortec mining Kenya, une filiale de sociétés anglaises et de l’entreprise canadienne Pacific Wildcat Resources.Alors que la compétition s’accélère globalement pour l’accès aux terres rares, l’ex-ambassadeur par intérim des Etats-Unis au Kenya, Marc Dillard, s’est donc rendu sur place en juin, selon plusieurs villageois interrogés par l’AFP, ce qu’a confirmé la représentation diplomatique américaine à Nairobi.Washington fait de la sécurisation des minerais critiques un élément central de sa diplomatie en Afrique, espérant concurrencer le quasi-monopole de la Chine dans ce secteur stratégique.La Maison Blanche se félicite notamment d’être parvenue à un accord de paix entre le Rwanda et la République démocratique du Congo -un pays extrêmement riche en ressources minières, même si les violences perdurent dans l’est.- “Grosses voitures” -Peu avant la venue du représentant américain, un consortium australien avait fait en avril une offre pour exploiter les terres rares. Des ressortissants chinois ont également récemment tenté de visiter les lieux, où les spéculateurs fonciers affluent, affirme Juma Koja, un gardien de la communauté.”Les gens viennent ici dans de grosses voitures (…), mais nous les refoulons”, assure-t-il à l’AFP, dont une équipe a dans un premier temps également été interdite d’accès à la forêt. “Je ne veux pas que mon peuple soit exploité”, justifie-t-il.Le gardien craint des dommages environnementaux irréversibles, notamment la perte d’arbres indigènes uniques comme la grande orchidée, déjà menacée alors que l’exploitation minière n’a pas encore débuté. “Dans mon coeur, je pleure” à cette pensée, confie-t-il.La forêt luxuriante, riche en plantes médicinales, abrite en outre des sanctuaires sacrés et assure depuis longtemps la subsistance de la population, bien que plus de la moitié de celle-ci vive aujourd’hui dans une pauvreté extrême, selon des données gouvernementales.La communauté locale s’inquiète surtout d’être expulsée du fait de l’exploitation du niobium dont elle ne toucherait rien. “Où nous emmèneront-ils?”, angoisse Mohammed Riko, 64 ans, vice-président de l’Association communautaire de la forêt de Mrima Hill. “Mrima est notre vie.” Le Kenya a imposé en 2019 une interdiction nationale sur les nouvelles licences minières en raison de préoccupations concernant la corruption et la dégradation de l’environnement, interdiction qu’il a progressivement assouplie depuis.La Chine limitant de plus en plus ses propres exportations de terres rares, Nairobi voit désormais des opportunités à saisir.- “Mourir pauvres” -Le ministère des Mines kényan a annoncé cette année des “réformes audacieuses”, notamment des allégements fiscaux et une transparence accrue des licences, visant à attirer les investisseurs et à faire passer le secteur de 0,8% du PIB à 10% d’ici 2030.Mais le Kenya manque de données précises sur ses sols, estime Daniel Weru Ichang’i, professeur retraité de géologie économique à l’Université de Nairobi.”Il existe une vue romantique des mines, qui sont perçues comme un secteur où l’on fait de l’argent facilement. Il faut que nous redescendions sur terre”, observe-t-il.Le corruption, très répandue au Kenya, “rend moins attractif ce secteur, déjà à très haut risque” pour d’éventuels investisseurs, poursuit Daniel Weru Ichang’i.En 2013, le Kenya avait révoqué la licence minière accordée à Cortec Mining Kenya, invoquant des irrégularités environnementales et de licence. L’entreprise affirme de son côté s’être vue sanctionnée pour avoir refusé de payer un pot-de-vin au ministre des Mines de l’époque, ce que celui-ci nie. Elle a perdu son recours devant un tribunal international.Domitilla Mueni, trésorière de l’Association de Mrima Hill, espère malgré tout d’importantes retombées. Elle-même a planté des arbres sur son terrain et l’a cultivé — afin de maximiser les profits au cas où des entreprises minières voudraient le racheter.Et de s’interroger: “Pourquoi devrions-nous mourir pauvres alors que nous avons des minerais?”

Présidentielle à Djibouti: La voie est ouverte à une nouvelle candidature d’Ismaël Omar Guelleh

La voie est ouverte à une nouvelle candidature à la tête de Djibouti d’Ismaël Omar Guelleh, au pouvoir sans partage depuis 1999: l’Assemblée nationale djiboutienne a voté dimanche à l’unanimité en faveur de la suppression dans la Constitution de la limite d’âge pour le président.Selon la Constitution du petit Etat de la Corne de l’Afrique, le chef de l’Etat ne peut pas concourir après 75 ans, ce qui empêchait M. Guelleh, 77 ans, de se présenter pour un sixième mandat à la prochaine élection présidentielle prévue en avril 2026.Sur les 65 parlementaires présents, tous ont voté en faveur de la suppression de la mention de l’âge, a affirmé à l’AFP l’ancien Premier ministre Dileita Mohamed Dileita et actuel président de l’Assemblée nationale.Ancienne colonie française jusqu’à son indépendance en 1977, Djibouti est un Etat stable en plein cœur d’une région troublée et suscite l’intérêt des grandes puissances. Il accueille notamment des bases militaires américaine, française et chinoise.Le chef de l’Etat peut désormais soit organiser un référendum sur cette question, soit demander à l’Assemblée de revoter une seconde fois sur cette modification de la Constitution, ce qui devrait intervenir le 2 novembre, a affirmé à l’AFP une source parlementaire. M. Guelleh avait laissé ouverte la porte à un nouveau mandat de cinq ans lors d’un entretien accordé en mai au magazine Jeune Afrique. “Je ne répondrai pas à cette question”, avait alors affirmé le chef de l’Etat djiboutien, interrogé sur une éventuelle nouvelle candidature. “Tout ce que je peux vous dire, c’est que j’aime trop mon pays pour l’embarquer dans une aventure irresponsable et être la cause de divisions”, avait-il poursuivi.- “Pas une surprise” – Ce vote n’est “pas une surprise”, a souligné auprès de l’AFP Sonia le Gouriellec, spécialiste de la Corne de l’Afrique et professeure à l’Université catholique de Lille (France). “Il y a des contestations sur les réseaux sociaux mais je crains que l’opposition n’ait pas l’espace pour s’exprimer à Djibouti”, poursuit-elle, dans un pays qui réprime les libertés d’expression et de la presse. Dileita Mohamed Dileita a affirmé de son côté à l’AFP que ce changement de la Constitution était nécessaire pour assurer “la stabilité du petit pays, dans une région, la Corne de l’Afrique, avec la Somalie, l’Ethiopie et l’Erythrée, troublée”. “Je pense que plus de 80% de la population soutient cela”, a-t-il également affirmé. En avril 2021, le chef de l’Etat djiboutien avait été réélu avec plus de 97% des voix et son parti, l’Union pour la majorité présidentielle (UMP) est hégémonique au Parlement. Ismaël Omar Guelleh, dit “IOG”, a succédé en 1999 à Hassan Gouled Aptidon, père de l’indépendance de Djibouti, après avoir été pendant 22 ans son chef de cabinet.En septembre, Alexis Mohamed, un proche conseiller du président djiboutien, avait annoncé sa démission en dénonçant le “recul démocratique” et la “gestion clientéliste” du pays.Djibouti, pays parmi les moins peuplés du continent avec quelque un million d’habitants, est situé face au Yémen, à la sortie de la mer Rouge, dans le détroit de Bab-el-Mandeb où transite une grande part du commerce mondial entre Asie et Occident.