Au nom de l’inox et des batteries, la plus grande mine de nickel au monde déloge une tribu

Bokum, membre d’une des dernières tribus de chasseurs-cueilleurs d’Indonésie, presque totalement isolée du monde moderne, se désespère: sa forêt vierge, stupéfiante de beauté sur une île des Moluques, est riche en nickel. Et abrite depuis six ans la plus grande mine de ce métal au monde, exploitée par des groupes chinois et français.Pour le voir de ses yeux, il faut s’enfoncer profondément dans la jungle de l’île de Halmahera, 2.400 km à l’est de Jakarta. Ici vit la tribu des Hongana Manyawa (“Peuple de la forêt”), dont 500 membres mènent encore une vie nomade et sans aucun contact avec la civilisation moderne.Bokum, lui, fait partie des 3.000 autres membres de la tribu acceptant des contacts limités. C’est donc lui qui montre à une équipe de l’AFP comment la vaste concession minière de Weda Bay Nickel défigure ses terres tribales.Au milieu d’une nature à couper le souffle, les machines abattent et creusent, et la mine s’étend pour répondre à la demande phénoménale de nickel, principalement pour fabriquer de l’acier inoxydable, et indispensable à la plupart des batteries des véhicules électriques. Pas moins de 17% du nickel mondial vient de cette seule mine, selon son site en 2023. L’Indonésie en est de très loin le premier producteur.”J’ai peur qu’ils continuent à détruire la forêt”, confie Bokum, qui dit ne plus trouver les cochons sauvage et poissons dont il se nourrissait. “Nous ne savons pas comment survivre sans notre terre, sans notre nourriture”.L’homme vit à 45 minutes de marche, un peu plus au coeur de la forêt. Il a accepté de témoigner en compagnie de son épouse Nawate qui, elle, garde le silence. Mais il ne s’attardera pas, car avant de se mettre en route, il a aperçu des ouvriers près de chez lui.”Les ouvriers de la mine ont essayé de cartographier notre territoire”, explique-t-il, une machette à portée de main. “C’est notre maison et nous ne la leur donnerons pas”.Le sort des Hongana Manyawa a suscité une certaine émotion ces derniers mois, après la diffusion de vidéos virales montrant des membres de la tribu amaigris et sortis de leur forêt pour mendier de la nourriture. Mais l’avenir de cette région, si loin de la capitale Jakarta, n’est pas une priorité.Trois jours de périple, sur 36 km à travers les 45.000 hectares de la concession minière, permettent pourtant de voir ce que coûtent, pour les humains comme pour la nature, les technologies modernes.Des explosions à répétition pour exposer le minerai font fuir des volées d’oiseaux. Des hélicoptères partagent le ciel avec des perroquets verts, des hiboux des Moluques, des calaos et des abeilles géantes.Des souches d’arbres, le long de la route, sont d’autres indices de l’invasion des machines. Et au loin, on aperçoit des gardiens de la mine tirant sur des oiseaux tropicaux avec leurs fusils à air comprimé.Toute la nuit, le vacarme des excavatrices arrachant la terre pénètre l’épaisse végétation, rivalisant avec les croassements des grenouilles et le bourdonnement des insectes.Le fond des rivières est tapissé d’une lourde boue recrachée par l’exploitation minière. Les poissons ont quasiment disparu de cette eau qui, quand on la traverse à gué, irrite la peau tant elle est souillée.- “Protocoles de contact” -La constitution indonésienne consacre les droits fonciers des autochtones. En 2013, la Cour constitutionnelle a même donné aux communautés locales le contrôle des forêts coutumières, plutôt qu’à l’Etat.Mais dépourvus de titres fonciers et faute de législation spécifique, les Hongana Manyawa ont peu de chances de faire valoir leurs droits sur les terres qui chevauchent la concession, selon les ONG.A fortiori face au géant qui leur fait face. La concession appartient à Weda Bay Nickel (WBN) qui a, via une coentreprise, pour actionnaire majoritaire le géant chinois de l’acier Tsingshan et minoritaire le groupe minier français Eramet, dont le nouveau patron accompagne le président Emmanuel Macron en visite en Indonésie. La mine demande à augmenter son droit d’extraction.WBN a indiqué à l’AFP être “engagée dans une exploitation minière responsable et la protection de l’environnement” et qu’elle formait ses employés au “respect des coutumes et traditions locales”. Il n’existe “aucune preuve que des groupes isolés ou non-contactés soient impactés par les activités de WBN”, selon l’entreprise.Eramet déclare à l’AFP avoir demandé aux actionnaires majoritaires de WBN l’autorisation de procéder cette année à un audit indépendant des “protocoles de contact” avec les Hongana Manyawa.Un examen plus approfondi de la manière dont la tribu utilise les forêts et les rivières de la région est également en cours, ajoute Eramet, qui affirme toutefois qu’il n’y a “aucune preuve” que des membres de la tribu vivent isolés dans sa concession.Mais le gouvernement indonésien a admis le contraire, dans une déclaration à l’AFP. Il existe “des preuves de l’existence de tribus isolées autour de Weda Bay”, a déclaré la direction générale du charbon et des minéraux du ministère indonésien de l’Energie et des Ressources minérales.La même direction dit s’engager à “protéger les droits des peuples autochtones et à garantir que les activités minières ne nuisent pas à leur vie et à leur environnement”.C’est la première reconnaissance officielle par Jakarta de la présence de Hongana Manyawa isolés dans la zone, selon l’ONG de défense des droits des autochtones Survival International.Pour l’ONG, qui évoque un “coup dur” pour les revendications d’Eramet, une zone interdite pour protéger la tribu est “le seul moyen d’empêcher son anéantissement”.Eramet indique sur son site former ses employés à la façon de se comporter s’ils rencontrent des Hongana Manyawa. Elle conseille aux employés de WBN d’éviter d’interagir avec des personnes non contactées si leur présence “est démontrée”.Tsingshan n’a pas répondu aux questions de l’AFP.Eramet, qui nie polluer l’eau de la région, affirme que l’exploitation minière a “créé de nombreuses nouvelles opportunités économiques”.Mais Bokum constate l’inverse: “depuis que l’entreprise a détruit notre maison, notre forêt, nous avons du mal à chasser, à trouver de l’eau propre”, affirme-t-il dans la langue indigène Tobelo. – Racket, prostitution -Depuis le début de l’exploitation du sol en 2019, la zone s’est rapidement transformée en une sorte de Far West.A un checkpoint près de l’immense parc industriel de Weda Bay, le véhicule des journalistes de l’AFP a été stoppé par plusieurs hommes exigeant de l’argent, avant qu’un responsable local n’intervienne.Non loin des villes limitrophes, à savoir Lelilef Sawai, Gemaf et Sagea, on croise des employés avec casques de chantier sur des routes boueuses et encombrées.Des boutiques rudimentaires bordent la route où des prostituées racolent les clients devant des hôtels infestés de punaises de lit.Au loin, les tours de fusion du nickel crachent un nuage artificiel qui flotte dans le ciel.La main-d’Å“uvre de la mine a plus que doublé depuis 2020 pour atteindre près de 30.000 personnes. Pour la plupart, il s’agit d’étrangers dont l’arrivée a créé des tensions et coïncidé avec une hausse des cas de maladies respiratoires et de VIH.”Les entreprises minières n’ont pas de bonnes pratiques, violent les droits de l’homme et font rarement de contrôles”, accuse Adlun Fiqri, porte-parole de l’association Save Sagea.”Bien avant l’exploitation minière, tout était vraiment calme et c’était agréable de vivre dans la forêt,” confie plus loin Ngigoro, qui a quitté le groupe isolé des Hongana Manyawa avec sa mère lorsqu’il était enfant. A l’époque, ils n’avaient “peur de rien”.”Cette terre appartient aux Hongana Manyawa,” ajoute cet homme de 62 ans, qui marque son chemin dans la forêt par des entailles sur les troncs d’arbre à l’aide de sa machette. Le sentiment est partagé dans l’est de l’île. Au moins 11 manifestants autochtones contre les activités minières y ont été interpelés, selon Amnesty International lundi.- Tesla s’en mêle -Bokum affirme avoir déménagé au moins six fois pour échapper aux mineurs qui empiétaient sur le territoire de son peuple.Les ONG craignent que la mine ne fasse tout simplement disparaître la tribu.”Ils dépendent entièrement de ce que la nature leur fournit et alors que leur forêt tropicale est dévastée, il en va de même pour eux,” s’alarme Callum Russell, de Survival International.Le gouvernement affirme avoir “réalisé une documentation” pour comprendre ces tribus isolées et assure les avoir impliquées “dans le processus de décision.”Mais pour les défenseurs des indigènes, ceci est impossible car la plupart d’entre eux n’utilisent pas la technologie moderne et évitent tout contact avec les étrangers.Récemment, quelques voix se sont élevées, notamment de grandes entreprises. Le constructeur automobile américain Tesla, propriété de Elon Musk, qui a signé des accords d’investissement dans le nickel indonésien, a proposé des zones interdites pour protéger les peuples autochtones.L’entreprise suédoise de véhicules électriques Polestar a déclaré l’an passé qu’elle chercherait à éviter de mettre en péril des “communautés non contactées” dans sa chaîne d’approvisionnement.Mais pour Bokum, le danger est déjà là: un site d’exploitation à ciel ouvert de 2,5 kilomètres de long s’étend juste derrière la colline où il cultive ananas et manioc.La mine a bien essayé de communiquer avec Bokum et son épouse, en leur fournissant des téléphones portables. Mais pour capter un signal, Bokum doit se rapprocher de la mine et quand des ouvriers s’approchent de chez lui, il réitère sa promesse, machette à la main: “C’est notre terre. Nous ne consentirons pas à sa destruction.”

Au nom de l’inox et des batteries, la plus grande mine de nickel au monde déloge une tribu

Bokum, membre d’une des dernières tribus de chasseurs-cueilleurs d’Indonésie, presque totalement isolée du monde moderne, se désespère: sa forêt vierge, stupéfiante de beauté sur une île des Moluques, est riche en nickel. Et abrite depuis six ans la plus grande mine de ce métal au monde, exploitée par des groupes chinois et français.Pour le voir de ses yeux, il faut s’enfoncer profondément dans la jungle de l’île de Halmahera, 2.400 km à l’est de Jakarta. Ici vit la tribu des Hongana Manyawa (“Peuple de la forêt”), dont 500 membres mènent encore une vie nomade et sans aucun contact avec la civilisation moderne.Bokum, lui, fait partie des 3.000 autres membres de la tribu acceptant des contacts limités. C’est donc lui qui montre à une équipe de l’AFP comment la vaste concession minière de Weda Bay Nickel défigure ses terres tribales.Au milieu d’une nature à couper le souffle, les machines abattent et creusent, et la mine s’étend pour répondre à la demande phénoménale de nickel, principalement pour fabriquer de l’acier inoxydable, et indispensable à la plupart des batteries des véhicules électriques. Pas moins de 17% du nickel mondial vient de cette seule mine, selon son site en 2023. L’Indonésie en est de très loin le premier producteur.”J’ai peur qu’ils continuent à détruire la forêt”, confie Bokum, qui dit ne plus trouver les cochons sauvage et poissons dont il se nourrissait. “Nous ne savons pas comment survivre sans notre terre, sans notre nourriture”.L’homme vit à 45 minutes de marche, un peu plus au coeur de la forêt. Il a accepté de témoigner en compagnie de son épouse Nawate qui, elle, garde le silence. Mais il ne s’attardera pas, car avant de se mettre en route, il a aperçu des ouvriers près de chez lui.”Les ouvriers de la mine ont essayé de cartographier notre territoire”, explique-t-il, une machette à portée de main. “C’est notre maison et nous ne la leur donnerons pas”.Le sort des Hongana Manyawa a suscité une certaine émotion ces derniers mois, après la diffusion de vidéos virales montrant des membres de la tribu amaigris et sortis de leur forêt pour mendier de la nourriture. Mais l’avenir de cette région, si loin de la capitale Jakarta, n’est pas une priorité.Trois jours de périple, sur 36 km à travers les 45.000 hectares de la concession minière, permettent pourtant de voir ce que coûtent, pour les humains comme pour la nature, les technologies modernes.Des explosions à répétition pour exposer le minerai font fuir des volées d’oiseaux. Des hélicoptères partagent le ciel avec des perroquets verts, des hiboux des Moluques, des calaos et des abeilles géantes.Des souches d’arbres, le long de la route, sont d’autres indices de l’invasion des machines. Et au loin, on aperçoit des gardiens de la mine tirant sur des oiseaux tropicaux avec leurs fusils à air comprimé.Toute la nuit, le vacarme des excavatrices arrachant la terre pénètre l’épaisse végétation, rivalisant avec les croassements des grenouilles et le bourdonnement des insectes.Le fond des rivières est tapissé d’une lourde boue recrachée par l’exploitation minière. Les poissons ont quasiment disparu de cette eau qui, quand on la traverse à gué, irrite la peau tant elle est souillée.- “Protocoles de contact” -La constitution indonésienne consacre les droits fonciers des autochtones. En 2013, la Cour constitutionnelle a même donné aux communautés locales le contrôle des forêts coutumières, plutôt qu’à l’Etat.Mais dépourvus de titres fonciers et faute de législation spécifique, les Hongana Manyawa ont peu de chances de faire valoir leurs droits sur les terres qui chevauchent la concession, selon les ONG.A fortiori face au géant qui leur fait face. La concession appartient à Weda Bay Nickel (WBN) qui a, via une coentreprise, pour actionnaire majoritaire le géant chinois de l’acier Tsingshan et minoritaire le groupe minier français Eramet, dont le nouveau patron accompagne le président Emmanuel Macron en visite en Indonésie. La mine demande à augmenter son droit d’extraction.WBN a indiqué à l’AFP être “engagée dans une exploitation minière responsable et la protection de l’environnement” et qu’elle formait ses employés au “respect des coutumes et traditions locales”. Il n’existe “aucune preuve que des groupes isolés ou non-contactés soient impactés par les activités de WBN”, selon l’entreprise.Eramet déclare à l’AFP avoir demandé aux actionnaires majoritaires de WBN l’autorisation de procéder cette année à un audit indépendant des “protocoles de contact” avec les Hongana Manyawa.Un examen plus approfondi de la manière dont la tribu utilise les forêts et les rivières de la région est également en cours, ajoute Eramet, qui affirme toutefois qu’il n’y a “aucune preuve” que des membres de la tribu vivent isolés dans sa concession.Mais le gouvernement indonésien a admis le contraire, dans une déclaration à l’AFP. Il existe “des preuves de l’existence de tribus isolées autour de Weda Bay”, a déclaré la direction générale du charbon et des minéraux du ministère indonésien de l’Energie et des Ressources minérales.La même direction dit s’engager à “protéger les droits des peuples autochtones et à garantir que les activités minières ne nuisent pas à leur vie et à leur environnement”.C’est la première reconnaissance officielle par Jakarta de la présence de Hongana Manyawa isolés dans la zone, selon l’ONG de défense des droits des autochtones Survival International.Pour l’ONG, qui évoque un “coup dur” pour les revendications d’Eramet, une zone interdite pour protéger la tribu est “le seul moyen d’empêcher son anéantissement”.Eramet indique sur son site former ses employés à la façon de se comporter s’ils rencontrent des Hongana Manyawa. Elle conseille aux employés de WBN d’éviter d’interagir avec des personnes non contactées si leur présence “est démontrée”.Tsingshan n’a pas répondu aux questions de l’AFP.Eramet, qui nie polluer l’eau de la région, affirme que l’exploitation minière a “créé de nombreuses nouvelles opportunités économiques”.Mais Bokum constate l’inverse: “depuis que l’entreprise a détruit notre maison, notre forêt, nous avons du mal à chasser, à trouver de l’eau propre”, affirme-t-il dans la langue indigène Tobelo. – Racket, prostitution -Depuis le début de l’exploitation du sol en 2019, la zone s’est rapidement transformée en une sorte de Far West.A un checkpoint près de l’immense parc industriel de Weda Bay, le véhicule des journalistes de l’AFP a été stoppé par plusieurs hommes exigeant de l’argent, avant qu’un responsable local n’intervienne.Non loin des villes limitrophes, à savoir Lelilef Sawai, Gemaf et Sagea, on croise des employés avec casques de chantier sur des routes boueuses et encombrées.Des boutiques rudimentaires bordent la route où des prostituées racolent les clients devant des hôtels infestés de punaises de lit.Au loin, les tours de fusion du nickel crachent un nuage artificiel qui flotte dans le ciel.La main-d’Å“uvre de la mine a plus que doublé depuis 2020 pour atteindre près de 30.000 personnes. Pour la plupart, il s’agit d’étrangers dont l’arrivée a créé des tensions et coïncidé avec une hausse des cas de maladies respiratoires et de VIH.”Les entreprises minières n’ont pas de bonnes pratiques, violent les droits de l’homme et font rarement de contrôles”, accuse Adlun Fiqri, porte-parole de l’association Save Sagea.”Bien avant l’exploitation minière, tout était vraiment calme et c’était agréable de vivre dans la forêt,” confie plus loin Ngigoro, qui a quitté le groupe isolé des Hongana Manyawa avec sa mère lorsqu’il était enfant. A l’époque, ils n’avaient “peur de rien”.”Cette terre appartient aux Hongana Manyawa,” ajoute cet homme de 62 ans, qui marque son chemin dans la forêt par des entailles sur les troncs d’arbre à l’aide de sa machette. Le sentiment est partagé dans l’est de l’île. Au moins 11 manifestants autochtones contre les activités minières y ont été interpelés, selon Amnesty International lundi.- Tesla s’en mêle -Bokum affirme avoir déménagé au moins six fois pour échapper aux mineurs qui empiétaient sur le territoire de son peuple.Les ONG craignent que la mine ne fasse tout simplement disparaître la tribu.”Ils dépendent entièrement de ce que la nature leur fournit et alors que leur forêt tropicale est dévastée, il en va de même pour eux,” s’alarme Callum Russell, de Survival International.Le gouvernement affirme avoir “réalisé une documentation” pour comprendre ces tribus isolées et assure les avoir impliquées “dans le processus de décision.”Mais pour les défenseurs des indigènes, ceci est impossible car la plupart d’entre eux n’utilisent pas la technologie moderne et évitent tout contact avec les étrangers.Récemment, quelques voix se sont élevées, notamment de grandes entreprises. Le constructeur automobile américain Tesla, propriété de Elon Musk, qui a signé des accords d’investissement dans le nickel indonésien, a proposé des zones interdites pour protéger les peuples autochtones.L’entreprise suédoise de véhicules électriques Polestar a déclaré l’an passé qu’elle chercherait à éviter de mettre en péril des “communautés non contactées” dans sa chaîne d’approvisionnement.Mais pour Bokum, le danger est déjà là: un site d’exploitation à ciel ouvert de 2,5 kilomètres de long s’étend juste derrière la colline où il cultive ananas et manioc.La mine a bien essayé de communiquer avec Bokum et son épouse, en leur fournissant des téléphones portables. Mais pour capter un signal, Bokum doit se rapprocher de la mine et quand des ouvriers s’approchent de chez lui, il réitère sa promesse, machette à la main: “C’est notre terre. Nous ne consentirons pas à sa destruction.”

Au nom de l’inox et des batteries, la plus grande mine de nickel au monde déloge une tribu

Bokum, membre d’une des dernières tribus de chasseurs-cueilleurs d’Indonésie, presque totalement isolée du monde moderne, se désespère: sa forêt vierge, stupéfiante de beauté sur une île des Moluques, est riche en nickel. Et abrite depuis six ans la plus grande mine de ce métal au monde, exploitée par des groupes chinois et français.Pour le voir de ses yeux, il faut s’enfoncer profondément dans la jungle de l’île de Halmahera, 2.400 km à l’est de Jakarta. Ici vit la tribu des Hongana Manyawa (“Peuple de la forêt”), dont 500 membres mènent encore une vie nomade et sans aucun contact avec la civilisation moderne.Bokum, lui, fait partie des 3.000 autres membres de la tribu acceptant des contacts limités. C’est donc lui qui montre à une équipe de l’AFP comment la vaste concession minière de Weda Bay Nickel défigure ses terres tribales.Au milieu d’une nature à couper le souffle, les machines abattent et creusent, et la mine s’étend pour répondre à la demande phénoménale de nickel, principalement pour fabriquer de l’acier inoxydable, et indispensable à la plupart des batteries des véhicules électriques. Pas moins de 17% du nickel mondial vient de cette seule mine, selon son site en 2023. L’Indonésie en est de très loin le premier producteur.”J’ai peur qu’ils continuent à détruire la forêt”, confie Bokum, qui dit ne plus trouver les cochons sauvage et poissons dont il se nourrissait. “Nous ne savons pas comment survivre sans notre terre, sans notre nourriture”.L’homme vit à 45 minutes de marche, un peu plus au coeur de la forêt. Il a accepté de témoigner en compagnie de son épouse Nawate qui, elle, garde le silence. Mais il ne s’attardera pas, car avant de se mettre en route, il a aperçu des ouvriers près de chez lui.”Les ouvriers de la mine ont essayé de cartographier notre territoire”, explique-t-il, une machette à portée de main. “C’est notre maison et nous ne la leur donnerons pas”.Le sort des Hongana Manyawa a suscité une certaine émotion ces derniers mois, après la diffusion de vidéos virales montrant des membres de la tribu amaigris et sortis de leur forêt pour mendier de la nourriture. Mais l’avenir de cette région, si loin de la capitale Jakarta, n’est pas une priorité.Trois jours de périple, sur 36 km à travers les 45.000 hectares de la concession minière, permettent pourtant de voir ce que coûtent, pour les humains comme pour la nature, les technologies modernes.Des explosions à répétition pour exposer le minerai font fuir des volées d’oiseaux. Des hélicoptères partagent le ciel avec des perroquets verts, des hiboux des Moluques, des calaos et des abeilles géantes.Des souches d’arbres, le long de la route, sont d’autres indices de l’invasion des machines. Et au loin, on aperçoit des gardiens de la mine tirant sur des oiseaux tropicaux avec leurs fusils à air comprimé.Toute la nuit, le vacarme des excavatrices arrachant la terre pénètre l’épaisse végétation, rivalisant avec les croassements des grenouilles et le bourdonnement des insectes.Le fond des rivières est tapissé d’une lourde boue recrachée par l’exploitation minière. Les poissons ont quasiment disparu de cette eau qui, quand on la traverse à gué, irrite la peau tant elle est souillée.- “Protocoles de contact” -La constitution indonésienne consacre les droits fonciers des autochtones. En 2013, la Cour constitutionnelle a même donné aux communautés locales le contrôle des forêts coutumières, plutôt qu’à l’Etat.Mais dépourvus de titres fonciers et faute de législation spécifique, les Hongana Manyawa ont peu de chances de faire valoir leurs droits sur les terres qui chevauchent la concession, selon les ONG.A fortiori face au géant qui leur fait face. La concession appartient à Weda Bay Nickel (WBN) qui a, via une coentreprise, pour actionnaire majoritaire le géant chinois de l’acier Tsingshan et minoritaire le groupe minier français Eramet, dont le nouveau patron accompagne le président Emmanuel Macron en visite en Indonésie. La mine demande à augmenter son droit d’extraction.WBN a indiqué à l’AFP être “engagée dans une exploitation minière responsable et la protection de l’environnement” et qu’elle formait ses employés au “respect des coutumes et traditions locales”. Il n’existe “aucune preuve que des groupes isolés ou non-contactés soient impactés par les activités de WBN”, selon l’entreprise.Eramet déclare à l’AFP avoir demandé aux actionnaires majoritaires de WBN l’autorisation de procéder cette année à un audit indépendant des “protocoles de contact” avec les Hongana Manyawa.Un examen plus approfondi de la manière dont la tribu utilise les forêts et les rivières de la région est également en cours, ajoute Eramet, qui affirme toutefois qu’il n’y a “aucune preuve” que des membres de la tribu vivent isolés dans sa concession.Mais le gouvernement indonésien a admis le contraire, dans une déclaration à l’AFP. Il existe “des preuves de l’existence de tribus isolées autour de Weda Bay”, a déclaré la direction générale du charbon et des minéraux du ministère indonésien de l’Energie et des Ressources minérales.La même direction dit s’engager à “protéger les droits des peuples autochtones et à garantir que les activités minières ne nuisent pas à leur vie et à leur environnement”.C’est la première reconnaissance officielle par Jakarta de la présence de Hongana Manyawa isolés dans la zone, selon l’ONG de défense des droits des autochtones Survival International.Pour l’ONG, qui évoque un “coup dur” pour les revendications d’Eramet, une zone interdite pour protéger la tribu est “le seul moyen d’empêcher son anéantissement”.Eramet indique sur son site former ses employés à la façon de se comporter s’ils rencontrent des Hongana Manyawa. Elle conseille aux employés de WBN d’éviter d’interagir avec des personnes non contactées si leur présence “est démontrée”.Tsingshan n’a pas répondu aux questions de l’AFP.Eramet, qui nie polluer l’eau de la région, affirme que l’exploitation minière a “créé de nombreuses nouvelles opportunités économiques”.Mais Bokum constate l’inverse: “depuis que l’entreprise a détruit notre maison, notre forêt, nous avons du mal à chasser, à trouver de l’eau propre”, affirme-t-il dans la langue indigène Tobelo. – Racket, prostitution -Depuis le début de l’exploitation du sol en 2019, la zone s’est rapidement transformée en une sorte de Far West.A un checkpoint près de l’immense parc industriel de Weda Bay, le véhicule des journalistes de l’AFP a été stoppé par plusieurs hommes exigeant de l’argent, avant qu’un responsable local n’intervienne.Non loin des villes limitrophes, à savoir Lelilef Sawai, Gemaf et Sagea, on croise des employés avec casques de chantier sur des routes boueuses et encombrées.Des boutiques rudimentaires bordent la route où des prostituées racolent les clients devant des hôtels infestés de punaises de lit.Au loin, les tours de fusion du nickel crachent un nuage artificiel qui flotte dans le ciel.La main-d’Å“uvre de la mine a plus que doublé depuis 2020 pour atteindre près de 30.000 personnes. Pour la plupart, il s’agit d’étrangers dont l’arrivée a créé des tensions et coïncidé avec une hausse des cas de maladies respiratoires et de VIH.”Les entreprises minières n’ont pas de bonnes pratiques, violent les droits de l’homme et font rarement de contrôles”, accuse Adlun Fiqri, porte-parole de l’association Save Sagea.”Bien avant l’exploitation minière, tout était vraiment calme et c’était agréable de vivre dans la forêt,” confie plus loin Ngigoro, qui a quitté le groupe isolé des Hongana Manyawa avec sa mère lorsqu’il était enfant. A l’époque, ils n’avaient “peur de rien”.”Cette terre appartient aux Hongana Manyawa,” ajoute cet homme de 62 ans, qui marque son chemin dans la forêt par des entailles sur les troncs d’arbre à l’aide de sa machette. Le sentiment est partagé dans l’est de l’île. Au moins 11 manifestants autochtones contre les activités minières y ont été interpelés, selon Amnesty International lundi.- Tesla s’en mêle -Bokum affirme avoir déménagé au moins six fois pour échapper aux mineurs qui empiétaient sur le territoire de son peuple.Les ONG craignent que la mine ne fasse tout simplement disparaître la tribu.”Ils dépendent entièrement de ce que la nature leur fournit et alors que leur forêt tropicale est dévastée, il en va de même pour eux,” s’alarme Callum Russell, de Survival International.Le gouvernement affirme avoir “réalisé une documentation” pour comprendre ces tribus isolées et assure les avoir impliquées “dans le processus de décision.”Mais pour les défenseurs des indigènes, ceci est impossible car la plupart d’entre eux n’utilisent pas la technologie moderne et évitent tout contact avec les étrangers.Récemment, quelques voix se sont élevées, notamment de grandes entreprises. Le constructeur automobile américain Tesla, propriété de Elon Musk, qui a signé des accords d’investissement dans le nickel indonésien, a proposé des zones interdites pour protéger les peuples autochtones.L’entreprise suédoise de véhicules électriques Polestar a déclaré l’an passé qu’elle chercherait à éviter de mettre en péril des “communautés non contactées” dans sa chaîne d’approvisionnement.Mais pour Bokum, le danger est déjà là: un site d’exploitation à ciel ouvert de 2,5 kilomètres de long s’étend juste derrière la colline où il cultive ananas et manioc.La mine a bien essayé de communiquer avec Bokum et son épouse, en leur fournissant des téléphones portables. Mais pour capter un signal, Bokum doit se rapprocher de la mine et quand des ouvriers s’approchent de chez lui, il réitère sa promesse, machette à la main: “C’est notre terre. Nous ne consentirons pas à sa destruction.”

Au nom de l’inox et des batteries, la plus grande mine de nickel au monde déloge une tribu

Bokum, membre d’une des dernières tribus de chasseurs-cueilleurs d’Indonésie, presque totalement isolée du monde moderne, se désespère: sa forêt vierge, stupéfiante de beauté sur une île des Moluques, est riche en nickel. Et abrite depuis six ans la plus grande mine de ce métal au monde, exploitée par des groupes chinois et français.Pour le voir de ses yeux, il faut s’enfoncer profondément dans la jungle de l’île de Halmahera, 2.400 km à l’est de Jakarta. Ici vit la tribu des Hongana Manyawa (“Peuple de la forêt”), dont 500 membres mènent encore une vie nomade et sans aucun contact avec la civilisation moderne.Bokum, lui, fait partie des 3.000 autres membres de la tribu acceptant des contacts limités. C’est donc lui qui montre à une équipe de l’AFP comment la vaste concession minière de Weda Bay Nickel défigure ses terres tribales.Au milieu d’une nature à couper le souffle, les machines abattent et creusent, et la mine s’étend pour répondre à la demande phénoménale de nickel, principalement pour fabriquer de l’acier inoxydable, et indispensable à la plupart des batteries des véhicules électriques. Pas moins de 17% du nickel mondial vient de cette seule mine, selon son site en 2023. L’Indonésie en est de très loin le premier producteur.”J’ai peur qu’ils continuent à détruire la forêt”, confie Bokum, qui dit ne plus trouver les cochons sauvage et poissons dont il se nourrissait. “Nous ne savons pas comment survivre sans notre terre, sans notre nourriture”.L’homme vit à 45 minutes de marche, un peu plus au coeur de la forêt. Il a accepté de témoigner en compagnie de son épouse Nawate qui, elle, garde le silence. Mais il ne s’attardera pas, car avant de se mettre en route, il a aperçu des ouvriers près de chez lui.”Les ouvriers de la mine ont essayé de cartographier notre territoire”, explique-t-il, une machette à portée de main. “C’est notre maison et nous ne la leur donnerons pas”.Le sort des Hongana Manyawa a suscité une certaine émotion ces derniers mois, après la diffusion de vidéos virales montrant des membres de la tribu amaigris et sortis de leur forêt pour mendier de la nourriture. Mais l’avenir de cette région, si loin de la capitale Jakarta, n’est pas une priorité.Trois jours de périple, sur 36 km à travers les 45.000 hectares de la concession minière, permettent pourtant de voir ce que coûtent, pour les humains comme pour la nature, les technologies modernes.Des explosions à répétition pour exposer le minerai font fuir des volées d’oiseaux. Des hélicoptères partagent le ciel avec des perroquets verts, des hiboux des Moluques, des calaos et des abeilles géantes.Des souches d’arbres, le long de la route, sont d’autres indices de l’invasion des machines. Et au loin, on aperçoit des gardiens de la mine tirant sur des oiseaux tropicaux avec leurs fusils à air comprimé.Toute la nuit, le vacarme des excavatrices arrachant la terre pénètre l’épaisse végétation, rivalisant avec les croassements des grenouilles et le bourdonnement des insectes.Le fond des rivières est tapissé d’une lourde boue recrachée par l’exploitation minière. Les poissons ont quasiment disparu de cette eau qui, quand on la traverse à gué, irrite la peau tant elle est souillée.- “Protocoles de contact” -La constitution indonésienne consacre les droits fonciers des autochtones. En 2013, la Cour constitutionnelle a même donné aux communautés locales le contrôle des forêts coutumières, plutôt qu’à l’Etat.Mais dépourvus de titres fonciers et faute de législation spécifique, les Hongana Manyawa ont peu de chances de faire valoir leurs droits sur les terres qui chevauchent la concession, selon les ONG.A fortiori face au géant qui leur fait face. La concession appartient à Weda Bay Nickel (WBN) qui a, via une coentreprise, pour actionnaire majoritaire le géant chinois de l’acier Tsingshan et minoritaire le groupe minier français Eramet, dont le nouveau patron accompagne le président Emmanuel Macron en visite en Indonésie. La mine demande à augmenter son droit d’extraction.WBN a indiqué à l’AFP être “engagée dans une exploitation minière responsable et la protection de l’environnement” et qu’elle formait ses employés au “respect des coutumes et traditions locales”. Il n’existe “aucune preuve que des groupes isolés ou non-contactés soient impactés par les activités de WBN”, selon l’entreprise.Eramet déclare à l’AFP avoir demandé aux actionnaires majoritaires de WBN l’autorisation de procéder cette année à un audit indépendant des “protocoles de contact” avec les Hongana Manyawa.Un examen plus approfondi de la manière dont la tribu utilise les forêts et les rivières de la région est également en cours, ajoute Eramet, qui affirme toutefois qu’il n’y a “aucune preuve” que des membres de la tribu vivent isolés dans sa concession.Mais le gouvernement indonésien a admis le contraire, dans une déclaration à l’AFP. Il existe “des preuves de l’existence de tribus isolées autour de Weda Bay”, a déclaré la direction générale du charbon et des minéraux du ministère indonésien de l’Energie et des Ressources minérales.La même direction dit s’engager à “protéger les droits des peuples autochtones et à garantir que les activités minières ne nuisent pas à leur vie et à leur environnement”.C’est la première reconnaissance officielle par Jakarta de la présence de Hongana Manyawa isolés dans la zone, selon l’ONG de défense des droits des autochtones Survival International.Pour l’ONG, qui évoque un “coup dur” pour les revendications d’Eramet, une zone interdite pour protéger la tribu est “le seul moyen d’empêcher son anéantissement”.Eramet indique sur son site former ses employés à la façon de se comporter s’ils rencontrent des Hongana Manyawa. Elle conseille aux employés de WBN d’éviter d’interagir avec des personnes non contactées si leur présence “est démontrée”.Tsingshan n’a pas répondu aux questions de l’AFP.Eramet, qui nie polluer l’eau de la région, affirme que l’exploitation minière a “créé de nombreuses nouvelles opportunités économiques”.Mais Bokum constate l’inverse: “depuis que l’entreprise a détruit notre maison, notre forêt, nous avons du mal à chasser, à trouver de l’eau propre”, affirme-t-il dans la langue indigène Tobelo. – Racket, prostitution -Depuis le début de l’exploitation du sol en 2019, la zone s’est rapidement transformée en une sorte de Far West.A un checkpoint près de l’immense parc industriel de Weda Bay, le véhicule des journalistes de l’AFP a été stoppé par plusieurs hommes exigeant de l’argent, avant qu’un responsable local n’intervienne.Non loin des villes limitrophes, à savoir Lelilef Sawai, Gemaf et Sagea, on croise des employés avec casques de chantier sur des routes boueuses et encombrées.Des boutiques rudimentaires bordent la route où des prostituées racolent les clients devant des hôtels infestés de punaises de lit.Au loin, les tours de fusion du nickel crachent un nuage artificiel qui flotte dans le ciel.La main-d’Å“uvre de la mine a plus que doublé depuis 2020 pour atteindre près de 30.000 personnes. Pour la plupart, il s’agit d’étrangers dont l’arrivée a créé des tensions et coïncidé avec une hausse des cas de maladies respiratoires et de VIH.”Les entreprises minières n’ont pas de bonnes pratiques, violent les droits de l’homme et font rarement de contrôles”, accuse Adlun Fiqri, porte-parole de l’association Save Sagea.”Bien avant l’exploitation minière, tout était vraiment calme et c’était agréable de vivre dans la forêt,” confie plus loin Ngigoro, qui a quitté le groupe isolé des Hongana Manyawa avec sa mère lorsqu’il était enfant. A l’époque, ils n’avaient “peur de rien”.”Cette terre appartient aux Hongana Manyawa,” ajoute cet homme de 62 ans, qui marque son chemin dans la forêt par des entailles sur les troncs d’arbre à l’aide de sa machette. Le sentiment est partagé dans l’est de l’île. Au moins 11 manifestants autochtones contre les activités minières y ont été interpelés, selon Amnesty International lundi.- Tesla s’en mêle -Bokum affirme avoir déménagé au moins six fois pour échapper aux mineurs qui empiétaient sur le territoire de son peuple.Les ONG craignent que la mine ne fasse tout simplement disparaître la tribu.”Ils dépendent entièrement de ce que la nature leur fournit et alors que leur forêt tropicale est dévastée, il en va de même pour eux,” s’alarme Callum Russell, de Survival International.Le gouvernement affirme avoir “réalisé une documentation” pour comprendre ces tribus isolées et assure les avoir impliquées “dans le processus de décision.”Mais pour les défenseurs des indigènes, ceci est impossible car la plupart d’entre eux n’utilisent pas la technologie moderne et évitent tout contact avec les étrangers.Récemment, quelques voix se sont élevées, notamment de grandes entreprises. Le constructeur automobile américain Tesla, propriété de Elon Musk, qui a signé des accords d’investissement dans le nickel indonésien, a proposé des zones interdites pour protéger les peuples autochtones.L’entreprise suédoise de véhicules électriques Polestar a déclaré l’an passé qu’elle chercherait à éviter de mettre en péril des “communautés non contactées” dans sa chaîne d’approvisionnement.Mais pour Bokum, le danger est déjà là: un site d’exploitation à ciel ouvert de 2,5 kilomètres de long s’étend juste derrière la colline où il cultive ananas et manioc.La mine a bien essayé de communiquer avec Bokum et son épouse, en leur fournissant des téléphones portables. Mais pour capter un signal, Bokum doit se rapprocher de la mine et quand des ouvriers s’approchent de chez lui, il réitère sa promesse, machette à la main: “C’est notre terre. Nous ne consentirons pas à sa destruction.”

Les Etats-Unis vont révoquer des visas d’étudiants chinois, condamnation de Pékin

La Chine a condamné jeudi la décision “déraisonnable” du gouvernement américain de révoquer “avec fermeté” des visas d’étudiants chinois, dans le cadre de la suspension par l’administration Trump du traitement des visas d’étudiants étrangers.Il s’agit de la dernière mesure en date prise par l’administration américaine dans son offensive contre les universités, visant notamment Harvard qui organise jeudi sa cérémonie annuelle de remise des diplômes.Le gouvernement américain va “révoquer avec fermeté les visas pour les étudiants chinois, notamment ceux ayant des liens avec le Parti communiste chinois ou étudiant dans des filières sensibles”, a affirmé mercredi le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio dans un communiqué.”Nous allons aussi revoir les critères pour renforcer l’examen de toutes les prochaines demandes de visa venant de la Chine et de Hong Kong”, a ajouté le secrétaire d’Etat.La Chine a condamné cette mesure jeudi. “Les États-Unis ont révoqué de manière déraisonnable les visas des étudiants chinois sous prétexte d’idéologie et de (protection des) droits nationaux”, a déploré devant la presse la porte-parole du ministère des Affaires étrangères Mao Ning.Plus de 277.000 Chinois étaient inscrits dans les universités américaines pour l’année 2023-2024, seulement dépassés par les étudiants indiens, selon un rapport approuvé par le département d’Etat.Les étudiants chinois représentent l’une des sources de revenus les plus importantes pour les universités aux Etats-Unis.”Cette décision, qui semble expéditive, a un impact dévastateur incommensurable”, a fustigé Bi Jingxin, un étudiant de 21 ans interrogé à Pékin par l’AFP. “Si nous, les Chinois, voulons étudier aux États-Unis, c’est surtout pour les enseignants et les excellents résultats académiques”, a poursuivi Bi. “Il semble que Trump et son équipe agissent (…) sans se soucier des conséquences.”Sur le campus de l’Université des études internationales de Pékin (BFSU) — l’une des plus prestigieuses du pays — l’atmosphère était également morose.”Si (les États-Unis) nous ciblent si fortement, cela réduit mes meilleures options”,estime Zhang Yue, 23 ans, qui avait envisagé de s’inscrire dans une université américaine mais qui pourrait opter pour l’Europe désormais.- Suspension des visas -Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, Donald Trump s’est lancé dans une vaste campagne contre des universités qu’il accuse de propager une idéologie “woke”.Il leur reproche notamment leurs politiques de promotion de la diversité ou encore d’avoir laissé se multiplier les manifestations contre la guerre à Gaza, qu’il associe à de l’antisémitisme.Lors de son premier mandat (2017-2021), le républicain avait surtout pris pour cible les étudiants chinois dans les filières jugées sensibles, soupçonnés de liens avec les renseignements chinois.L’administration Trump, décidée à imposer son idéologie nationaliste et conservatrice, avait ordonné mardi la suspension du traitement des visas pour les étudiants étrangers, dont elle veut passer au crible les réseaux sociaux.Dans un document interne consulté par l’AFP, le département d’Etat demande désormais aux ambassades et consulats américains de ne pas autoriser de “rendez-vous pour de nouveaux visas étudiants ou de programmes d’échange”, en attendant la publication de “directives sur l’examen approfondi des réseaux sociaux pour toutes les demandes de ce type”.Depuis janvier, des centaines d’étudiants étrangers ont déjà vu leurs visas révoqués, tandis que des étudiants en situation régulière sur le sol américain ayant participé à des manifestations propalestiniennes ont été arrêtés et menacés d’expulsion.A Harvard, “un nombre incalculable d’étudiants étrangers se sont renseignés sur la possibilité d’un transfert vers une autre” université, ainsi que sur “leur situation et leurs options”, a écrit mercredi la directrice des services d’immigration de la prestigieuse université américaine, Maureen Martin, dans un dépôt d’acte judiciaire. – “Censure des Américains” -L’offensive de M. Trump a provoqué “une peur profonde”, de “la confusion” et “une détresse émotionnelle” parmi les étudiants et les chercheurs étrangers, a-t-elle ajouté.La charge de Donald Trump va au-delà des étudiants, l’administration américaine ayant annoncé mercredi qu’elle refuserait des visas aux responsables étrangers qui “censurent” les Américains sur les réseaux sociaux.M. Rubio – blâmé par certains pour avoir revoqué des visas de personnes ayant critiqué Israël – a estimé qu’il existait des “actions flagrantes de censure” à l’étranger contre des entreprises américaines.Il a annoncé mercredi, en guise de représailles, “une nouvelle politique de restriction des visas qui s’appliquera aux responsables étrangers et aux personnes qui se rendent complices de la censure des Américains”, sans citer de noms.burs-rr/lgo/pt/cco

Les Etats-Unis vont révoquer des visas d’étudiants chinois, condamnation de Pékin

La Chine a condamné jeudi la décision “déraisonnable” du gouvernement américain de révoquer “avec fermeté” des visas d’étudiants chinois, dans le cadre de la suspension par l’administration Trump du traitement des visas d’étudiants étrangers.Il s’agit de la dernière mesure en date prise par l’administration américaine dans son offensive contre les universités, visant notamment Harvard qui organise jeudi sa cérémonie annuelle de remise des diplômes.Le gouvernement américain va “révoquer avec fermeté les visas pour les étudiants chinois, notamment ceux ayant des liens avec le Parti communiste chinois ou étudiant dans des filières sensibles”, a affirmé mercredi le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio dans un communiqué.”Nous allons aussi revoir les critères pour renforcer l’examen de toutes les prochaines demandes de visa venant de la Chine et de Hong Kong”, a ajouté le secrétaire d’Etat.La Chine a condamné cette mesure jeudi. “Les États-Unis ont révoqué de manière déraisonnable les visas des étudiants chinois sous prétexte d’idéologie et de (protection des) droits nationaux”, a déploré devant la presse la porte-parole du ministère des Affaires étrangères Mao Ning.Plus de 277.000 Chinois étaient inscrits dans les universités américaines pour l’année 2023-2024, seulement dépassés par les étudiants indiens, selon un rapport approuvé par le département d’Etat.Les étudiants chinois représentent l’une des sources de revenus les plus importantes pour les universités aux Etats-Unis.”Cette décision, qui semble expéditive, a un impact dévastateur incommensurable”, a fustigé Bi Jingxin, un étudiant de 21 ans interrogé à Pékin par l’AFP. “Si nous, les Chinois, voulons étudier aux États-Unis, c’est surtout pour les enseignants et les excellents résultats académiques”, a poursuivi Bi. “Il semble que Trump et son équipe agissent (…) sans se soucier des conséquences.”Sur le campus de l’Université des études internationales de Pékin (BFSU) — l’une des plus prestigieuses du pays — l’atmosphère était également morose.”Si (les États-Unis) nous ciblent si fortement, cela réduit mes meilleures options”,estime Zhang Yue, 23 ans, qui avait envisagé de s’inscrire dans une université américaine mais qui pourrait opter pour l’Europe désormais.- Suspension des visas -Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, Donald Trump s’est lancé dans une vaste campagne contre des universités qu’il accuse de propager une idéologie “woke”.Il leur reproche notamment leurs politiques de promotion de la diversité ou encore d’avoir laissé se multiplier les manifestations contre la guerre à Gaza, qu’il associe à de l’antisémitisme.Lors de son premier mandat (2017-2021), le républicain avait surtout pris pour cible les étudiants chinois dans les filières jugées sensibles, soupçonnés de liens avec les renseignements chinois.L’administration Trump, décidée à imposer son idéologie nationaliste et conservatrice, avait ordonné mardi la suspension du traitement des visas pour les étudiants étrangers, dont elle veut passer au crible les réseaux sociaux.Dans un document interne consulté par l’AFP, le département d’Etat demande désormais aux ambassades et consulats américains de ne pas autoriser de “rendez-vous pour de nouveaux visas étudiants ou de programmes d’échange”, en attendant la publication de “directives sur l’examen approfondi des réseaux sociaux pour toutes les demandes de ce type”.Depuis janvier, des centaines d’étudiants étrangers ont déjà vu leurs visas révoqués, tandis que des étudiants en situation régulière sur le sol américain ayant participé à des manifestations propalestiniennes ont été arrêtés et menacés d’expulsion.A Harvard, “un nombre incalculable d’étudiants étrangers se sont renseignés sur la possibilité d’un transfert vers une autre” université, ainsi que sur “leur situation et leurs options”, a écrit mercredi la directrice des services d’immigration de la prestigieuse université américaine, Maureen Martin, dans un dépôt d’acte judiciaire. – “Censure des Américains” -L’offensive de M. Trump a provoqué “une peur profonde”, de “la confusion” et “une détresse émotionnelle” parmi les étudiants et les chercheurs étrangers, a-t-elle ajouté.La charge de Donald Trump va au-delà des étudiants, l’administration américaine ayant annoncé mercredi qu’elle refuserait des visas aux responsables étrangers qui “censurent” les Américains sur les réseaux sociaux.M. Rubio – blâmé par certains pour avoir revoqué des visas de personnes ayant critiqué Israël – a estimé qu’il existait des “actions flagrantes de censure” à l’étranger contre des entreprises américaines.Il a annoncé mercredi, en guise de représailles, “une nouvelle politique de restriction des visas qui s’appliquera aux responsables étrangers et aux personnes qui se rendent complices de la censure des Américains”, sans citer de noms.burs-rr/lgo/pt/cco

44 killed in Israel attacks in Gaza, after food warehouse looted

At least 44 people were killed in Israeli attacks across the Gaza Strip on Thursday, rescuers said, a day after a World Food Programme warehouse in the centre of the territory was looted by desperate Palestinians.After a more than two-month blockade, aid has finally begun to trickle back into Gaza, but the humanitarian situation remains dire after 18 months of devastating war. Food security experts say starvation is looming for one in five people.The Israeli military has also recently stepped up its offensive in the territory in what it says is a renewed push to destroy Hamas, whose October 7, 2023 attack triggered the war.Gaza civil defence official Mohammad al-Mughayyir told AFP “44 people have been killed in Israeli raids”, including 23 in a strike on home in Al-Bureij. “Two people were killed and several injured by Israeli forces’ gunfire this morning near the American aid centre in the Morag axis, southern Gaza Strip,” he added.The centre, run by the US-backed Gaza Humanitarian Foundation (GHF), is part of a new system for distributing aid that Israel says is meant to keep supplies out of the hands of Hamas, but which has drawn criticism from the United Nations and the European Union.”What is happening to us is degrading. The crowding is humiliating us,” said Gazan Sobhi Areef, who visited a GHF centre on Thursday. “We go there and risk our lives just to get a bag of flour to feed our children.”The Israeli military said it was looking into the reported deaths in Al-Bureij and near the aid centre.Separately, it said in a statement that its forces had struck “dozens of terror targets throughout the Gaza Strip” over the past day.In a telephone call Thursday with EU foreign policy chief Kaja Kallas, Jordanian Foreign Minister Ayman Safadi said Israel’s “systematic starvation tactics have crossed all moral and legal boundaries”.- ‘Hordes of hungry people’ -On Wednesday, thousands of desperate Palestinians stormed a World Food Programme (WFP) warehouse in central Gaza, with Israel and the UN trading blame over the deepening hunger crisis. AFP footage showed crowds of Palestinians breaking into the WFP facility in Deir al-Balah and taking bags of emergency food supplies as gunshots rang out.”Hordes of hungry people broke into WFP’s Al-Ghafari warehouse in Deir Al-Balah, central Gaza, in search of food supplies that were pre-positioned for distribution,” the UN agency said in a statement.The issue of aid has come sharply into focus amid starvation fears and intense criticism of the GHF, which has bypassed the longstanding UN-led system in the territory.Israel’s ambassador to the United Nations Danny Danon told the Security Council that aid was entering Gaza by truck — under limited authorisation by Israel at the Kerem Shalom crossing — and accused the UN of “trying to block” GHF’s work through “threats, intimidation and retaliation against NGOs that choose to participate”.The UN has said it is doing its utmost to facilitate distribution of the limited assistance allowed by Israel’s authoritiesThe world body said 47 people were wounded Tuesday when crowds of Palestinians rushed a GHF site. A Palestinian medical source reported at least one death.GHF, however, alleged in a statement that there had been “several inaccuracies” circulating about its operations, adding “there are many parties who wish to see GHF fail”.But 60-year-old Abu Fawzi Faroukh, who visited a GHF centre Thursday, said the situation there was “so chaotic”. “The young men are the ones who have received aid first, yesterday and today, because they are young and can carry loads, but the old people and women cannot enter due to the crowding,” he told AFP.- ‘Nothing has changed’ -Negotiations on a ceasefire, meanwhile, have continued, with US envoy Steve Witkoff expressing optimism and saying he expected to propose a plan soon.But Gazans remained pessimistic.”Six hundred days have passed and nothing has changed. Death continues, and Israeli bombing does not stop,” said Bassam Daloul, 40.The Gaza war was sparked by Hamas’s October 2023 attack on Israel that killed 1,218 people, mostly civilians, according to an AFP tally based on official figures.Out of 251 hostages seized during the attack, 57 remain in Gaza including 34 the Israeli military says are dead. The health ministry in Hamas-run Gaza said Thursday that at least 3,986 people had been killed in the territory since Israel ended the ceasefire on March 18, taking the war’s overall toll to 54,249, mostly civilians.