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En sursis, le gouvernement Barnier sur le point de tomber

Le fragile gouvernement de Michel Barnier n’a peut-être plus que quelques jours à vivre. Le Premier ministre a été contraint lundi d’engager sa responsabilité sur le budget de la Sécurité sociale, un premier 49.3 synonyme de motion de censure et sans doute de chute, puisque la gauche et le RN ont annoncé qu’ils la voteraient à l’unisson.L’adoption par l’Assemblée nationale d’une telle motion de censure serait une première depuis le renversement du gouvernement de Georges Pompidou en 1962. Le gouvernement Barnier deviendrait alors le plus court de l’histoire de la Ve République.”Nous sommes parvenus désormais à un moment de vérité qui met chacun devant ses responsabilités”, a déclaré Michel Barnier devant l’Assemblée nationale, mettant en garde contre la possibilité que le pays entre “en territoire inconnu”.Le Premier ministre de 73 ans, nommé par Emmanuel Macron le 5 septembre, venait devant la chambre pour dégainer le fameux article 49 alinéa 3 de la Constitution qui permet l’adoption d’un texte sans vote. Il expose aussi le gouvernement au risque d’une motion de censure.Celle-ci n’a pas tardé, à l’initiative de l’alliance de gauche Nouveau Front populaire.”Il aura à la fois le déshonneur et la censure”, a fustigé la cheffe des députés de La France insoumise, pointant les concessions du gouvernement au Rassemblement national.Le texte, qui sera débattu mercredi au plus tôt, sera défendu par le président de la commission des Finances, l’Insoumis Eric Coquerel. Le groupe RN a déjà fait savoir qu’il le voterait, mais aussi qu’il déposait sa propre motion de censure avec ses alliés ciottistes.Pour faire chuter le gouvernement, 288 députés devront voter la censure, soit un nombre très largement à la portée d’une alliance de circonstances entre la gauche et le RN.”M. Barnier n’a pas souhaité répondre à la demande des 11 millions d’électeurs du Rassemblement national”, “il a dit que chacun assume ses responsabilités, nous assumerons donc les nôtres”, a déclaré Marine Le Pen.Dépourvu de majorité à l’Assemblée, le gouvernement a multiplié au cours de la dernière semaine les concessions au parti d’extrême droite, que ce soit sur les taxes sur l’électricité ou sur l’Aide médicale d’Etat – insuffisamment toutefois sur ce sujet selon Mme Le Pen.Dans la matinée, Michel Barnier s’était entretenu au téléphone avec la députée du Pas-de-Calais, puis avait annoncé dans un communiqué un nouveau geste dans sa direction en s’engageant “à ce qu’il n’y ait pas de déremboursement des médicaments” en 2025, alors que le gouvernement avait prévu une baisse de 5%.Mais pour Marine Le Pen, le compte n’y était toujours pas. En arrivant à l’Assemblée dans l’après-midi, juste avant une séance cruciale, elle a réaffirmé qu’elle demandait au chef du gouvernement de renoncer à la désindexation partielle des retraites s’il voulait échapper à la censure.- “Au bout du dialogue” -Le Premier ministre a fermé la porte à de nouvelles concessions dans son discours: “J’ai été au bout du dialogue avec l’ensemble des groupes politiques”.L’Assemblée était appelée à voter sur le texte issu la semaine dernière des travaux d’une commission mixte paritaire députés-sénateurs, qui prévoit désormais 18,3 milliards d’euros de déficit en 2025, soit 2,3 milliards de plus que l’objectif de 16 milliards fixé au début de l’automne.Si le gouvernement Barnier tombait, la France s’enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin, avec en outre le risque d’une crise financière liée la capacité de la France à emprunter sur les marchés à de faibles taux.”Sans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale que nous examinons aujourd’hui, le déficit des comptes sociaux atteindrait près de 30 milliards d’euros l’an prochain”, a mis en garde dans l’hémicycle le ministre du Budget Laurent Saint-Martin.L’écart entre les taux d’intérêt d’emprunt de la France et de l’Allemagne (le “spread”) a fortement augmenté après l’annonce de Michel Barnier, signe de l’inquiétude des investisseurs.L’Elysée n’a fait aucun commentaire sur la nouvelle donne politique, alors qu’Emmanuel Macron a atterri à Ryad pour une visite d’Etat de trois jours en Arabie saoudite. Mais c’est bien le chef de l’Etat qui aura rapidement la main car, si le scénario d’une censure se confirme, il devra nommer un Premier ministre.”Cette motion de censure n’est pas une fin en soi, elle n’est pas non plus un outil qui vise à la déstabilisation”, ont assuré dans un communiqué les élus socialistes, appelant le chef de l’Etat à nommer un Premier ministre de gauche.Dos au mur, les neuf chefs de groupes parlementaires composant le “socle gouvernemental” à l’Assemblée et au Sénat – parmi lesquels Gabriel Attal et Laurent Wauquiez – ont lancé une ultime mise en garde. “Voter une motion de censure reviendrait à plonger le pays dans l’inconnu”, ont-ils averti dans un communiqué commun, plaidant au contraire pour “la stabilité et l’apaisement”.

Budget: le NFP et l’alliance RN-Ciotti déposent chacun une motion de censure contre Barnier

Les quatre présidents des groupes composant le Nouveau Front populaire (NFP), et 181 de leurs collègues, ont déposé lundi une motion de censure qui devrait faire chuter le gouvernement Barnier cette semaine, grâce au soutien du Rassemblement national qui a déposé sa propre motion.Le dépôt de cette motion fait suite à l’utilisation par M. Barnier de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution pour faire adopter sans vote le budget 2025 de la Sécurité sociale. Elle sera défendue par le président de la commission des Finances Eric Coquerel (LFI) et devrait être débattue mercredi, si la conférence des présidents en décide ainsi mardi.Le RN et ses alliés ciottistes du groupe UDR ont eux aussi déposé une motion de censure, signée selon leur communiqué par les 140 députés composant actuellement leur coalition.Les deux motions feront l’objet d’un débat commun, mais de votes séparés. En toute logique, c’est celle de la gauche qui devrait être adoptée puisque le RN a officiellement annoncé qu’il la voterait – alors qu’à l’inverse, le NFP n’entend pas voter celle du RN.Dans son texte, l’alliance du Nouveau Front populaire (193 députés au total) dénonce la “diminution de plus de 62 milliards d’euros par an des recettes de l’Etat” depuis 2017, “au profit des très grandes entreprises et des contribuables les plus fortunés”, qui a “alimenté un déficit budgétaire record”.Pour la gauche, Michel Barnier “poursuit le dogmatisme des soutiens d’Emmanuel Macron, qui refusent toute mesure de justice sociale”, et “fait le choix de l’austérité” en demandant aux Français de “payer la facture: taxation des retraités par la désindexation partielle et différée des pensions de retraites, taxation des patients par la hausse du reste à charge sur les soins, taxation des apprentis, taxation du système de santé par 600 millions d’euros de coupes budgétaires supplémentaires…”, regrette-t-elle.”Le gouvernement et les députés qui le soutiennent sont restés obtus et dans la défense acharnée d’une politique pourtant sanctionnée dans les urnes”, et “à aucun moment, le gouvernement n’a pris en compte les votes de l’Assemblée et ouvert le chemin de la discussion”, fustigent les auteurs.Surtout, les députés du NFP accusent Michel Barnier d’avoir “cédé (aux) plus viles obsessions” du RN, en promettant une nouvelle loi immigration et une remise en cause de l’Aide médicale d’Etat (AME), destinée aux immigrés sans papiers.De leur côté Marine Le Pen, Eric Ciotti et les députés de leurs groupes dénoncent notamment “l’absence d’économies structurelles pourtant attendues par les Français sur l’immigration ou sur la contribution de la France à l’Union Européenne”.Ils reprochent aussi au gouvernement de n’avoir “jamais voulu entendre les propositions formulées par le groupe RN et le groupe UDR” dans un contre-budget et d’aller contre “le vote de 11 millions de Français” qui les ont soutenus aux dernières législatives.Ils estiment également que, malgré des concessions du gouvernement au RN en fin de course, le projet de budget comporte encore “deux lignes rouges”: une revalorisation des retraites insuffisante à leurs yeux, ainsi qu’une “hausse du coût du travail”.

En sursis, le gouvernement Barnier devrait tomber dans les prochains jours

Le fragile gouvernement de Michel Barnier n’a probablement plus que quelques jours à vivre. Le Premier ministre a été contraint lundi d’engager sa responsabilité sur le budget de la Sécurité sociale, un premier 49.3 synonyme de motion de censure et sans doute de chute, puisque la gauche et le RN ont annoncé qu’ils la voteraient à l’unisson.L’adoption par l’Assemblée nationale d’une telle motion de censure serait une première depuis le renversement du gouvernement de Georges Pompidou en 1962. Le gouvernement Barnier deviendrait alors le plus court de l’histoire de la Ve République.”Nous sommes parvenus désormais à un moment de vérité qui met chacun devant ses responsabilités. C’est maintenant à vous (…) de décider si notre pays se dote de textes financiers responsables, indispensables et utiles à nos concitoyens. Ou alors si nous entrons en territoire inconnu”, a déclaré Michel Barnier devant l’Assemblée nationale.Le Premier ministre de 73 ans, nommé par Emmanuel Macron le 5 septembre, venait devant la chambre pour dégainer le fameux article 49.3 de la Constitution qui permet l’adoption d’un texte sans vote. Il expose aussi le gouvernement au risque d’une motion de censure.Celle-ci n’a pas tardé, à l’initiative de l’alliance de gauche Nouveau Front populaire.”Il aura à la fois le déshonneur et la censure”, a fustigé la cheffe des députés de La France insoumise, pointant les concessions du gouvernement au Rassemblement national.Le texte, qui sera débattu mercredi au plus tôt, sera défendu par le président de la commission des Finances, l’Insoumis Eric Coquerel. Le groupe RN a déjà fait savoir qu’il le voterait, mais aussi qu’il déposerait sa propre motion de censure.”M. Barnier n’a pas souhaité répondre à la demande des 11 millions d’électeurs du Rassemblement national”, “il a dit que chacun assume ses responsabilités, nous assumerons donc les nôtres”, a déclaré Marine Le Pen à la presse.Dépourvu de majorité à l’Assemblée, le gouvernement a multiplié au cours de la dernière semaine les concessions au parti d’extrême droite, que ce soit sur les taxes sur l’électricité, ou sur l’Aide médicale d’Etat – insuffisamment toutefois sur ce sujet selon Mme Le Pen.Dans la matinée, Michel Barnier s’était entretenu au téléphone avec la députée du Pas-de-Calais, puis avait annoncé dans un communiqué un nouveau geste dans sa direction, en s’engageant “à ce qu’il n’y ait pas de déremboursement des médicaments” en 2025, alors que le gouvernement avait prévu une baisse de 5%. Mais pour Marine Le Pen, le compte n’y était toujours pas. En arrivant à l’Assemblée dans l’après-midi, juste avant une séance cruciale, elle a réaffirmé qu’elle demandait au chef du gouvernement de renoncer à la désindexation partielle des retraites s’il voulait échapper à la censure.- “Au bout du dialogue” -Le Premier ministre a fermé la porte à de nouvelles concessions dans son discours: “J’ai été au bout du dialogue avec l’ensemble des groupes politiques”.L’Assemblée était appelée à voter sur le texte issu la semaine dernière des travaux d’une commission mixte paritaire députés-sénateurs, qui prévoit désormais 18,3 milliards d’euros de déficit en 2025, soit 2,3 milliards de plus que l’objectif de 16 milliards fixé au début de l’automne.Si le gouvernement Barnier tombait, la France s’enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin, avec en outre le risque d’une crise financière liée la capacité de la France à emprunter sur les marchés à de faibles taux. “Sans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale que nous examinons aujourd’hui, le déficit des comptes sociaux atteindrait près de 30 milliards d’euros l’an prochain”, a mis en garde dans l’hémicycle le ministre du Budget Laurent Saint-Martin.L’écart entre les taux d’intérêt d’emprunt de la France et de l’Allemagne (le “spread”) a fortement augmenté après l’annonce de Michel Barnier, signe de l’inquiétude des investisseurs.L’Elysée n’a fait aucun commentaire sur la nouvelle donne politique, alors qu’Emmanuel Macron a atterri à Ryad pour une visite d’Etat de trois jours en Arabie saoudite. Mais c’est bien le chef de l’Etat qui aura rapidement la main car, si le scénario d’une censure se confirme, il devra nommer un Premier ministre.Dos au mur, les neuf chefs de groupes parlementaires composant le “socle gouvernemental” à l’Assemblée et au Sénat – parmi lesquels Gabriel Attal et Laurent Wauquiez – ont lancé une ultime mise en garde. “Voter une motion de censure reviendrait à plonger le pays dans l’inconnu”, ont-ils averti dans un communiqué commun, plaidant au contraire pour “la stabilité et l’apaisement”.

Immigration: le Sénat réduit le budget de l’aide médicale d’Etat de 200 millions d’euros

Le Sénat a approuvé lundi, avec l’appui du gouvernement, une diminution de 200 millions d’euros du budget alloué à l’aide médicale d’Etat (AME) destinée aux sans-papiers, appelant à réfléchir à une réforme structurelle, déjà promise par Michel Barnier s’il résiste à la censure.En parallèle des débats mouvementés de l’Assemblée nationale, où le gouvernement est visé par une motion de censure sur son budget de la Sécurité sociale, la chambre haute continue d’examiner un autre texte budgétaire, le budget de l’Etat. Même si tous les débats pourraient s’arrêter si le gouvernement tombe.Soutien de l’exécutif, le Sénat et sa majorité de droite et du centre ont ainsi adopté une mesure sensible en réduisant l’AME de 200 millions d’euros, sur un total d’1,3 milliard, en augmentation de plus de 9% par rapport à 2024.La droite et les centristes ont voté pour, la gauche et le groupe macroniste s’y sont opposés, pour un total de 201 voix contre 126.”Cette proposition est une première réponse pour juguler une dépense qui ne cesse de croître chaque année”, a salué la sénatrice LR Marie-Do Aeschlimann. Sur le fond, le Sénat n’a pas procédé à la réduction du périmètre de soins éligibles à l’AME, une demande tenace de la droite et de l’extrême droite.Le dispositif voté par les sénateurs se borne à modifier la prise en charge de prestations “non-urgentes”, qui seraient désormais conditionnées à un “accord préalable” systématique de l’Assurance maladie. Mais la droite et les centristes ont appelé à aller plus loin dans les prochaines semaines.La ministre de la Santé Geneviève Darrieussecq a rendu un avis favorable à cette évolution, tout en appelant à ne pas “perdre de vue les besoins sanitaires du pays”.”Le budget de l’AME doit participer, comme tous les autres budgets, à l’effort national de rationalisation des dépenses”, a-t-elle expliqué.Le Premier ministre Michel Barnier avait annoncé ces derniers jours qu’il engagerait “dès l’an prochain” une réforme de l’AME, en réduisant “sensiblement” le “panier de soins” pris en charge.La gauche s’est vivement opposée à cette mesure.”Le gouvernement a voulu sacrifier l’aide médicale d’État pour satisfaire l’extrême droite. Il aura la censure et le déshonneur”, s’est indigné le président des sénateurs socialistes Patrick Kanner.”Quand j’entends le gouvernement dire qu’il envisage dans sa générosité de baisser l’AME de 200 millions, je me dis que l’on se moque du monde, surtout quand dans le même temps il envisageait de dérembourser des médicaments. Ca n’est pas admissible”, a pour sa part réagi la cheffe des députés RN Marine Le Pen.En 2024, l’enveloppe de l’AME prévue par l’État représentait environ 0,5% des dépenses de santé prévues par le budget de la Sécu (PLFSS). Selon une étude de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes), 51% des personnes éligibles bénéficient de l’AME.

Le pouvoir d’achat, première préoccupation des Français dans un pays “en déclin” selon un sondage

Le pouvoir d’achat demeure la première préoccupation des Français dans un pays qu’ils jugent massivement “en déclin”, selon une enquête annuelle Ipsos-Sopra Steria publiée lundi.Interrogés sur les enjeux qui les préoccupent le plus “à titre personnel”, les Français placent en tête “les difficultés en termes de pouvoir d’achat” (38%), devant “la protection de l’environnement” (23%) et “le niveau de la délinquance” (22%), selon ce sondage sur “les fractures françaises” pour Le Monde, le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof) la Fondation Jean-Jaurès et l’Institut Montaigne.L’enjeu du pouvoir d’achat est jugé prioritaire sauf chez les sympathisants du parti de droite Les Républicains (LR) qui s’inquiètent d’abord du “niveau de la délinquance” (34%). Chez les soutiens du Rassemblement national, c’est avant tout “le niveau de l’immigration” (50%) qui passe en priorité.Autre enseignement de cette enquête, la France “est en déclin” pour près de neuf Français sur dix (87%, 18 points en plus par rapport à l’élection présidentielle en 2017). “Les Français sont horrifiés, voire tétanisés par les évènements d’extrême violence dont ils sont témoins, en direct ou par médias interposés”, analyse ainsi Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos. Mais 53% d’entre eux considèrent que ce “n’est pas irréversible”. Et seuls 3% des Français se disent “satisfaits ou apaisés” lorsqu’ils sont interrogés sur leur sentiment d’appartenir à un pays “en colère et très contestataire”.Sur les réponses à apporter, près d’un tiers des Français (31%) souhaitent une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale après celle décidée le 9 juin dernier tandis que 52% d’entre eux sont favorables à la démission d’Emmanuel Macron.La France vit dans un climat de crise politique depuis six mois et les élections législatives anticipées qui n’ont pas dégagé de majorité. Et le Premier ministre Michel Barnier est en grand danger d’être censuré sur les textes budgétaires 2025 par les voix des députés de la gauche et du Rassemblement national.L’adoption d’une motion de censure serait une première depuis la chute du gouvernement de Georges Pompidou en 1962. Le gouvernement Barnier deviendrait alors le plus court de l’histoire de la Ve République.L’enquête a été réalisée en ligne du 14 au 21 novembre, auprès d’un échantillon de 3.000 personnes de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

Déjà très affaibli, Macron face à la mission impossible de l’après-Barnier

En retrait, Emmanuel Macron? “Il n’a jamais renoncé à être au centre du jeu. Vous verrez”, prédisait début novembre un confident. Voilà que la crise précipite le retour en première ligne du président pour préparer l’après-Barnier.Et l’expose aussi, lui que beaucoup jugent responsable de cette impasse.Sauf coup de théâtre, le gouvernement de Michel Barnier devrait être renversé cette semaine par les députés. Le pays replonge donc dans la plus grave crise politique de la Ve République, provoquée par la dissolution de l’Assemblée nationale et que la nomination de ce Premier ministre de droite, il y a tout juste trois mois, n’aura fait que mettre entre parenthèses.Jusqu’au bout, l’Elysée a campé sur la même ligne: “le président de la République souhaite la stabilité”, martelait encore son entourage lundi matin. Avant de se refuser à tout commentaire quand la censure s’est avérée inéluctable.Mais ces derniers temps, le chef de l’Etat avait intégré cette option. Il a donc commencé à “réfléchir” discrètement à la suite, reconnaît un proche.Ce dernier pense qu’il va devoir “aller assez vite pour nommer quelqu’un” à Matignon, et ne pas temporiser à outrance comme il l’avait fait après les législatives, cet été.Dans son camp, si les liens se sont distendus, certains espèrent encore qu’il trouve la martingale. “La Ve République, ça ne marche pas sans le président de la République. Après quelques tours autour de la Terre, Macron doit revenir dans l’atmosphère et donner une direction”, plaide un député de son parti, Renaissance.- “Légitimité démocratique” -Emmanuel Macron n’a toutefois pas beaucoup d’atouts en main. Renommer Michel Barnier? Une autre personnalité à la tête du même attelage fragile entre le centre et la droite? Ou se tourner vers l’ex-Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve, qu’il avait hésité à désigner en septembre?Quelle que soit la piste retenue, l’équation reste la même à l’Assemblée: aucune configuration ne semble promettre une majorité pour faire passer un budget pour 2025, alors que les marchés se montrent de plus en plus fébriles.Sa posture sera aussi scrutée de près.Quasiment muet sur la politique intérieure ces derniers mois, il retrouve son rôle d’arbitre et va devoir s’exprimer. Mais “il ne peut pas paraître celui qui danse sur la tombe de Barnier”, prévient une ex-ministre macroniste.”L’enjeu pour lui va être de rester en surplomb alors que l’opinion le rend responsable de la situation, en raison des deux éléments déterminants que sont la dissolution et le déficit public dégradé de la France”, explique le sondeur Bernard Sananès, de l’institut Elabe. Selon lui, “il reçoit l’addition de tout ce qui lui est reproché, y compris par une partie de son électorat”.Si les stratèges de l’Elysée espéraient que la réserve présidentielle lui redonne des couleurs dans l’opinion, il n’en est rien: sa popularité est au plus bas depuis son arrivée au pouvoir en 2017, ou depuis la crise des gilets jaunes l’année suivante, selon les baromètres.L’échec de Michel Barnier est aussi considéré par plusieurs de ses opposants comme le sien, puisque c’est lui qui avait sorti l’ex-commissaire européen de sa retraite. A l’époque, il avait préféré le gaulliste de 73 ans à une personnalité de gauche en assurant qu’il répondait davantage à un critère de “non-censurabilité” qui sonne un peu creux aujourd’hui.A gauche, mais aussi à l’extrême droite et parfois au centre, quelques voix s’élèvent pour affirmer qu’une démission d’Emmanuel Macron est la seule solution pour dénouer la crise. Parmi ses soutiens aussi, certains redoutent que ces appels s’amplifient si à la censure probable de ce gouvernement s’ajoute, de manière rapprochée, la chute du suivant.”Ça devient très compliqué”, estime le politologue Bruno Cautrès. “D’un point de vue de la légitimité démocratique, il n’a plus la moindre marge de manoeuvre pour se tromper à nouveau: s’il nomme un Premier ministre qui est lui aussi censuré, ou s’il dissout l’été prochain et perd encore les élections, je ne vois pas comment il peut se maintenir.”

Macron entame une visite d’Etat en Arabie en pleine crise politique en France

Emmanuel Macron a entamé lundi une visite d’Etat de trois jours en Arabie saoudite, un acteur régional clé avec lequel Paris veut intensifier les liens, en pleine crise politique en France.Le président a atterri peu avant 16H00 GMT à Ryad, la capitale du royaume, alors que le gouvernement français, en place depuis à peine plus de deux mois, s’apprête à être renversé au Parlement.Le Premier ministre, Michel Barnier, a demandé dans l’après-midi une adoption sans vote du budget de la Sécurité sociale, ouvrant la voie à une motion de censure qui a toutes les chances d’être votée dans les prochains jours.Le chef de l’Etat, qui n’a pas fait de commentaires sur la situation politique en France, s’est immédiatement rendu au Palais royal pour un premier entretien en tête-à-tête suivi d’un dîner avec le prince héritier Mohammed ben Salmane, dirigeant de facto du royaume.Emmanuel Macron, fort de son rôle dans le cessez-le-feu au Liban, entend renforcer l’influence de la France dans la région, secouée par de multiples conflits, avant le retour du républicain Donald Trump à la Maison Blanche. Il espère aussi regagner à l’international la marge de manoeuvre qu’il a complètement perdue sur la scène intérieure depuis la dissolution de juin.Il s’agit de son troisième déplacement en Arabie saoudite depuis 2017, une “relation très dense” à laquelle l’homme fort du pays, un temps paria après l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi en Turquie, a répondu par trois visites officielles en France. Les deux dirigeants vont “acter un rehaussement de la relation bilatérale au niveau d’un partenariat stratégique”, a annoncé l’Elysée, rappelant que la dernière visite présidentielle d’Etat remontait à Jacques Chirac en 2006.Ils vont voir comment “travailler ensemble” sur les conflits qui secouent la région et les risques d’escalade généralisée.Avec au “coeur des discussions” le Liban, après une trêve fragile entrée en vigueur mercredi entre Israël et le mouvement chiite Hezbollah, soutenu par l’Iran.Emmanuel Macron espère un soutien saoudien à l’armée libanaise, qui se redéploie à la frontière avec Israël mais manque de moyens, et au règlement de la crise politique qui secoue le Liban depuis plus de deux ans.- Soutien au Liban -La monarchie du Golfe, longtemps influente politiquement et financièrement au Liban, s’en est désengagée ces dernières années face au chaos politique et au poids grandissant du Hezbollah.Ce dernier sort très affaibli du conflit avec Israël et Ryad pourrait se décider à “financer à nouveau des acquisitions au profit des Forces armées libanaises, voire une aide à l’économie libanaise”, avance un connaisseur du dossier à Paris.Les deux pays appellent aussi à un cessez-le-feu à Gaza et à une “issue politique” au conflit israélo-palestinien reposant sur la “solution des +deux Etats+”. L’Arabie saoudite, qui abrite les lieux les plus saints de l’islam, est engagée dans des discussions avec Washington pour normaliser ses relations avec Israël et l’octroi de garanties de sécurité américaines.Mais mi-septembre, le prince héritier a exclu une reconnaissance d’Israël avant la “création d’un Etat palestinien”.L’offensive lancée en Syrie par des groupes rebelles dirigés par des islamistes contre le régime de Bachar al-Assad rouvre aussi un nouveau front d’instabilité.La visite présidentielle aura un important volet économique mardi alors que le royaume, premier exportateur mondial de brut, s’est engagé dans une diversification accélérée pour faire face à un potentiel après-pétrole.Les deux pays ambitionnent de “renforcer de manière très importante” leurs échanges économiques qui ne sont pas “à la hauteur des ambitions communes”, souligne l’Elysée.- Contrats -Le chef de l’Etat sera accompagné d’une cinquantaine de patrons de grands groupes français (Total, EDF, Veolia…) et de start-up (Pasqal, Alan, Mistral…) emblématiques de l’économie du futur.Les deux pays veulent engager des coopérations dans tous les secteurs d’avenir, de la transition énergétique à l’intelligence artificielle, en phase avec le vaste programme de modernisation de la société et de l’économie saoudiennes (Vision 2030) du prince héritier. Des discussions sont également en cours pour l’acquisition d’avions de chasse Rafale par l’Arabie. “La visite du président pourrait permettre d’emporter une décision, pas forcément une annonce”, selon une source proche du dossier.La France est aussi un partenaire clé de Ryad en matière culturelle et touristique, avec le développement d’un mégaprojet de 20 milliards de dollars autour de l’oasis et du site archéologique d’Al-Ula, au nord de Médine (nord-ouest).Emmanuel Macron assistera au One Water Summit sur la gestion de l’eau mardi à Ryad avant de rejoindre mercredi Al-Ula avec notamment la ministre de la Culture Rachida Dati, avec des annonces en perspective.

Motion de censure: une procédure fréquente, une seule fois avec succès sous la Ve

Plus de cent-trente motions de censure ont été déposées depuis 1958 avant celles annoncées lundi mais une seule, en 1962, contre l’élection du président de la République au suffrage universel, a été adoptée, ce qui avait fait chuter le gouvernement Pompidou.Une motion de censure peut en effet être à l’initiative des députés pour censurer la politique d’un gouvernement (art 49.2), comme cette fois-là avec succès.Elle peut aussi être utilisée après l’engagement de la responsabilité du gouvernement sur le vote d’un texte (art 49.3), comme ce fut par exemple le cas à deux reprises et sans succès le 20 mars 2023 pour le texte sur la réforme des retraites défendue par la Première ministre Elisabeth Borne. La motion de censure transpartisane déposée par les députés indépendants Liot n’avait alors été rejetée qu’à 9 voix près. Mme Borne a totalisé une trentaine de motions de censure. Son successeur Gabriel Attal, trois.Michel Barnier a fait face à sa première motion de censure (présentée par la gauche), en octobre, soit un mois après sa nomination.Pour être adoptée, une motion de censure doit recueillir la majorité absolue (287 voix) et aucune déposée suite à un 49.3 n’a été adoptée depuis la naissance de la Ve République. Le dépôt de plusieurs motions de censure simultanées n’est pas rare. Les votes étant séparés, un député peut apporter sa voix à deux motions.En 1979 et 1980, socialistes et communistes avaient ainsi déposé plusieurs motions parallèles contre le gouvernement de Raymond Barre. L’une d’elles, visant le projet de budget pour 1980, avait notamment pour premier signataire François Mitterrand. Sous le gouvernement de Michel Rocard (1988-1991), pas moins de cinq motions de censure de droite ont répliqué – en vain – au recours du Premier ministre au 49.3. Un chiffre tombé à deux quand Edith Cresson occupa cette fonction.Sous Manuel Valls, la loi Macron “pour la croissance et l’activité” fut adoptée en 2015 après deux motions de censure de la part de la droite.  En 1962, la motion de censure des opposants au projet d’élection du président de la République au suffrage universel est déposée par le centre, les socialistes et la droite non gaulliste (article 49.2). Elle est adoptée le vendredi 5 octobre par 280 députés sur 480, dont les 10 communistes.Le lendemain, Georges Pompidou remet la démission de son gouvernement au général de Gaulle, qui lui demande de rester quelques temps en fonction, puis dissout le 10 octobre l’Assemblée nationale. Le oui à l’élection présidentielle au suffrage universel l’emporte largement lors d’un référendum le 28 octobre, et les gaullistes remportent les élections législatives un mois plus tard. M. Pompidou est alors confirmé à son poste.

Pas de budget de la Sécu? Beaucoup de problèmes à résoudre

En cas de censure cette semaine du gouvernement de Michel Barnier, l’absence de budget de la Sécurité sociale ne l’empêchera pas brutalement de fonctionner début janvier. Mais un certain nombre de casse-têtes juridiques et politiques vont très vite se poser.- Autoriser la Sécu à emprunter – L’absence de budget dédié priverait la Sécu (ou plutôt son trésorier, l’Acoss) d’une autorisation d’emprunt pour boucler ses fins de mois et parvenir à financer les prestations, malgré son déficit structurel. Les experts estiment que cette autorisation devrait pouvoir être donnée via une loi spéciale, voire par voie réglementaire, sans besoin d’un nouveau projet de loi. Toutefois, les spécialistes du droit public ne s’accordent pas tous sur la meilleure manière de procéder avec un gouvernement démissionnaire.Il reste un peu de temps pour résoudre le problème, la Sécu disposant – selon plusieurs sources proches des administrations concernées – de quelques mois de réserves avant de devoir emprunter à nouveau.Lundi à l’Assemblée nationale, le rapporteur du budget de la Sécu, Yannick Neuder (LR), a estimé qu’un rejet du budget ne laisserait “que quelques semaines de trésorerie” aux organismes publics pour “payer les retraites, rembourser les soins et financer les impôts”. “En mars prochain, qui veut que les cartes vitales cessent de fonctionner?”, a-t-il interrogé, quelques minutes avant que le Premier ministre ne dégaine l’article 49-3, s’exposant à une motion de censure.- Fixer les tarifs hospitaliers -Le budget de la Sécu fixe chaque année un objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam), qui prévoit, entre autres, l’enveloppe financière allouée aux hôpitaux publics et privés sur l’année.Cette enveloppe (105,8 milliards d’euros dans le projet de budget de la Sécu 2025) permet ensuite au gouvernement de calculer la rémunération des hôpitaux, en fixant en particulier les tarifs des actes de soin. Si cette enveloppe n’est pas déterminée, “il n’y a plus de base juridique solide” pour le faire, expliquait récemment Dominique Libault, le président du Haut conseil pour le financement de la protection sociale (HCFiPS).Dans un premier temps, la solution sera probablement de reconduire les tarifs de 2024, “ce qui n’est pas une très bonne nouvelle pour les établissements de santé”, a-t-il estimé.Les hôpitaux, en lourd déficit, estiment avoir besoin en 2025 d’une hausse de 6% de l’enveloppe de 2024. Dans son budget, l’exécutif prévoyait une augmentation de 3,1%.- Maitriser le déficit -L’absence de Loi de financement (LFSS) priverait aussi le gouvernement de dispositions censées l’aider à maitriser le lourd déficit de la Sécu. La dernière version du projet de budget adoptée en commission mixte paritaire (CMP) prévoit notamment de rogner de 1,6 milliard d’euros les exonérations de cotisations patronales, ou encore de renforcer la taxation sur les boissons très sucrées, pour doter la Sécu de nouvelles ressources.Le budget prévoit aussi des outils pour ralentir les dépenses de l’Assurance maladie, par exemple via des économies sur les médicaments, ou en négociant de nouvelles baisses de tarifs avec les biologistes, radiologues et taxis conventionnés qui transportent des malades.Sans ce texte, “le déficit des comptes sociaux atteindrait 30 milliards d’euros l’an prochain”, a averti le ministre du Budget Laurent Saint-Martin devant l’Assemblée nationale.La version adoptée en CMP prévoyait un déficit d’environ 18,3 milliards d’euros en 2025, contre 16 dans la version initiale proposée en octobre par le gouvernement. – Des retraités épargnés? -En vertu du Code de la Sécurité sociale, les retraites de base sont chaque année revalorisées début janvier, indexées sur l’inflation constatée par l’Insee (Institut national des statistiques) pour l’année précédente.Pour économiser 3 milliards d’euros, le projet de LFSS prévoyait de les sous-indexer en 2025, à hauteur de la moitié de l’inflation, sauf pour les pensions inférieures au Smic qui devaient recevoir un complément en juillet. Sans ce texte, la loi prévaut et la hausse des pensions se fera d’office sur l’inflation, assurent deux fins connaisseurs de la Sécu.- Réformes en suspens -Sans LFSS, un certain nombre de mesures devront attendre un autre véhicule législatif pour être adoptées, ont rappelé lundi des défenseurs du texte: exonérations de cotisations sociales vieillesse pour les médecins en cumul emploi-retraite, alignement du calcul des retraites agricoles sur celles du régime général, campagne de vaccination papillomavirus-méningocoques au collège, consultations en accès direct chez le psychologue dans le cadre de Mon Soutien Psy… 

La censure du gouvernement, le va-tout risqué de Marine Le Pen

En apportant leurs voix, décisives, à la censure du gouvernement, Marine Le Pen et les siens jouent leur va-tout: si elle est réclamée par les sympathisants RN, la chute annoncée de Michel Barnier comporte d’innombrables inconnues qui pourraient se retourner contre ses instigateurs.Le “miracle”, évoqué lundi matin par Jordan Bardella et qui aurait pu faire changer d’avis les lepénistes, n’est pas survenu: “Nous voterons la censure du gouvernement”, a confirmé dans l’après-midi la cheffe des députés du Rassemblement national, après que le Premier ministre a utilisé quelques minutes plus tôt l’article 49.3 de la Constitution sur le budget de la Sécurité sociale.Afin de lever toute ambiguïté, la triple candidate malheureuse à la présidentielle a précisé que ses troupes voteraient l’ensemble des motions, “d’où (qu’elles) viennent”, y compris celle de l’alliance de gauche du Nouveau Front populaire.Avec ses quelque 120 députés, c’est donc bien le Rassemblement national qui apporte les voix nécessaires pour atteindre la majorité de 288 “pour” renverser le gouvernement – le NFP, qui compte pour sa part un peu moins de 200 membres, avait pu mesurer son impuissance lorsqu’il avait tenté une manÅ“uvre similaire début octobre, sans parvenir à rallier d’autres forces politiques.Le parti à la flamme entend ainsi présenter comme un trophée la chute du Premier ministre – qui devrait intervenir mercredi ou jeudi. Pour la première fois de son histoire quinquagénaire, le Front national devenu Rassemblement national peut se targuer d’un pouvoir direct et tangible sur “le système” tant pourfendu, marque de sa toute-puissance dans une Assemblée sans majorité.La jubilation de ce triomphe en vaut-elle pour autant la chandelle? Non, avaient jusqu’alors estimé la majeure partie des cadres du mouvement, Marine Le Pen en tête, qui préféraient faire de la nomination de Michel Barnier l’occasion de faire du Premier ministre un obligé.Les promesses d’écoute du nouveau chef du gouvernement, voire de négociation, telle que l’avait espéré la députée d’Hénin-Beaumont, devaient encore participer à la respectabilisation d’un RN. Lequel pouvait se targuer de son influence, Michel Barnier cédant tour à tour sur deux revendications: les prix de l’électricité et le déremboursement des médicaments.- Protestataire -En se résolvant à changer de stratégie, les lepénistes ont juré en mesurer les risques.Pressés par leur base électorale de renverser Michel Barnier, ils ont toutefois longtemps estimé que l’emploi de cette arme suprême pouvait enrayer leur stratégie de conquête vers la droite traditionnelle, soucieuse de stabilité, d’abord économique.”On considère qu’on met plutôt fin au chaos tel qu’il est aujourd’hui”, estimait lundi un proche de Marine Le Pen, selon qui l’épouvantail d’une crise financière, brandi par les soutiens du gouvernement, “a beaucoup moins marché que ce qu’on aurait pu craindre”.Reste que la décision de censurer renvoie à la fonction éternellement protestataire du RN, que seule une minorité de Français (44%) juge d’ailleurs “capable de gouverner le pays”, selon une étude Ipsos parue lundi.Jusqu’à la dernière minute, Mme Le Pen avait d’ailleurs voulu apparaître comme force de proposition, conditionnant son pouce levé à d’ultimes concessions réclamées à M. Barnier. En vain.En faisant le pari de la rupture, la formation d’extrême droite devient désormais de fait comptable de l’incertitude dans laquelle le pays s’apprête à plonger.Que peut-elle désormais espérer d’un futur gouvernement ? Comment sortir son épingle du jeu ?”Un Premier ministre de gauche, c’est pas bien pour le pays mais ça nous met au centre du jeu et disloque le bloc central. Ça peut rattraper un certain nombre de gens qui sont plutôt à droite et qui se disent on bascule sur Marine Le Pen qui est la seule qui peut nous préserver face à la gauche”, anticipe un haut cadre du parti.Et, si elle jure ne pas réclamer officiellement le départ d’Emmanuel Macron, Marine Le Pen l’esquisse: “lorsqu’il qu’il existe une crise politique grave, le président de la République a trois possibilités, le remaniement, la dissolution et sa démission”. En prenant soin de rappeler que les deux premières ont déjà été purgées.Au RN, si on se prend à rêver d’un big-bang présidentiel anticipé, on espère qu’il interviendra avant le 31 mars: la date prévue du jugement du tribunal correctionnel qui, s’il suivait les réquisitions du parquet, pourrait condamner Mme Le Pen à une inéligibilité avec effet immédiat.