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A l’Assemblée, les ministres plaident pour un arsenal contre le narcotrafic devant une gauche inquiète

Érigée en priorité par le gouvernement, la lutte contre le narcotrafic a commencé à être débattue en commission à l’Assemblée nationale mardi, avec une proposition de loi sur laquelle la gauche a émis de nombreuses réserves, notamment au regard des libertés individuelles.Ce texte transpartisan, adopté à l’unanimité au Sénat début février, entend compléter l’arsenal répressif contre le trafic de drogues et prévoit notamment la création d’un parquet spécialisé.Mais les débats promettent d’être plus mouvementés qu’à la chambre haute, avec quelque 500 amendements déposés par les députés. Tout en reconnaissant le “fléau” du narcotrafic, la députée socialiste Colette Capdevielle a alerté: “Attention aux atteintes aux droits de la défense (…), aux atteintes à la vie privée (…), aux droits fondamentaux.” L’examen en commission des Lois, qui devrait se poursuivre jusqu’à vendredi, a commencé mardi après-midi avec l’audition des ministres de la Justice Gérald Darmanin et de l’Intérieur Bruno Retailleau.Le narcotrafic “est à la fois la cause racine de l’hyper violence qu’on voit partout en France” et “une menace existentielle sur nos institutions”, a déclaré ce dernier. “Le moment est venu de reprendre le contrôle.”Il a mis en avant la nécessité de nouvelles techniques spéciales d’enquêtes. Si le texte “devait ressortir sans aucune mesure qui permettrait que nous puissions lutter à armes égales” en matière de nouvelles technologies, “il n’y aurait aucun texte”, a-t-il alerté.L’une des ces techniques, et l’un des principaux points de crispation, imposerait aux plateformes de messagerie chiffrée (Signal, WhatsApp…) d’autoriser l’accès aux correspondances des trafiquants par les services de renseignement.Plusieurs groupes politiques ont déposé des amendements pour supprimer l’article, dont des députés du groupe macroniste Ensemble pour la République (EPR), dénonçant une “porte dérobée” dangereuse.”Affaiblir le chiffrement ne pénaliserait pas seulement les criminels. Cela exposerait aussi nos citoyens, nos entreprises et nos infrastructures aux cyberattaques”, a mis en garde la ministre chargée de l’Intelligence artificielle et du Numérique, Clara Chappaz.- Nouveau régime carcéral -La proposition phare du texte, issu d’une commission d’enquête sénatoriale, consiste en la création d’un parquet national anticriminalité organisée (Pnaco). Sur le modèle des parquets financier (PNF) et antiterroriste (Pnat), il serait saisi des crimes les plus graves.Un rapport d’étape rendu mardi à Gérald Darmanin a préconisé qu’il soit implanté à Paris -et non Marseille-, avec une entrée en vigueur “pas avant début 2026”.Les prérogatives de ce parquet pourraient à l’avenir être étendues à la cybercriminalité, pour englober le blanchiment d’argent via cryptomonnaies, a déclaré M. Darmanin mardi.Le gouvernement a par ailleurs déposé un amendement visant à créer dans les prisons des quartiers de lutte contre la criminalité organisée, avec fouilles intégrales après tout contact avec l’extérieur, ou encore accès limité au téléphone. Des détenus pourraient y être placés sur décision du garde des Sceaux.Il s’agit “d’isoler les personnes les plus dangereuses”, entre 600 et 800 détenus, a dit le ministre de la Justice. Un tel régime serait “attentatoire aux droits fondamentaux”, a toutefois mis en garde l’Observatoire international des prisons (OIP).M. Darmanin a annoncé avoir saisi le Conseil d’Etat sur cette question, pour éventuellement modifier le texte en séance.- “Dossier-coffre” -Parmi les autres mesures du texte: la fermeture administrative de commerces soupçonnés d’agir comme “blanchisseuses”, la création d’une procédure “d’injonction pour richesse inexpliquée” pour obliger les suspects à s’expliquer sur leur train de vie, ou encore la possibilité pour les préfets de prononcer des “interdictions de paraître” sur les points de deal.Un article prévoit de rendre possible l’activation à distance d’un appareil électronique (micro, caméra…). Un dispositif censuré par le passé par le Conseil constitutionnel pour atteinte à la vie privée.Autre disposition décriée, la création d’un “procès-verbal distinct”, surnommé “dossier-coffre”, pour ne pas divulguer certaines techniques d’enquête sensibles. Une mesure faisant craindre des atteintes aux droits de la défense.Face à des “organisations professionnelles”, “il faut faire très attention de ne pas livrer des noms” d’informateurs ou d’enquêteurs, a plaidé le ministre de l’Intérieur. “Votre logique est celle d’un élargissement des moyens techniques au mépris du respect des droits”, a rétorqué le député La France insoumise Antoine Léaument.Le texte doit arriver dans l’hémicycle la semaine du 17 mars, avant un vote solennel prévu le 25 mars. 

Mort de Jean-Louis Debré, grand témoin de la Ve République, de l’Assemblée au Conseil constitutionnel

Un nom de famille irrémédiablement lié à la Ve République: Jean-Louis Debré, proche de l’ancien président Jacques Chirac, ex-président de l’Assemblée nationale et du Conseil constitutionnel, est décédé dans la nuit de lundi à mardi à l’âge de 80 ans.La famille de l’ancien élu de l’Eure a annoncé le décès mardi matin à LCI, dirigée par l’un de ses fils, le journaliste Guillaume Debré. L’actuelle présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a déploré la perte d’un “immense serviteur de l’État”, évoquant “un amoureux de la République”.L’Assemblée nationale lui a rendu hommage et respecté une minute de silence avant la séance de questions au gouvernement. Le Sénat le fera également.”Jean-Louis Debré a consacré sa vie à une certaine idée de la France”, a réagi sur X le président Emmanuel Macron, saluant “un homme de droit et de droiture”.Le chef du gouvernement, François Bayrou, a souligné son “esprit particulier” et “la profondeur” de son “engagement”.”C’était un personnage truculent et assez unique (…) héritier d’une grande famille politique”, a commenté sur France Inter l’ancien Premier ministre et maire du Havre, Édouard Philippe.Le fils de Michel Debré, rédacteur de la Constitution de la Ve République et premier chef de gouvernement de Charles de Gaulle en 1959, était un proche de Jacques Chirac, dont il fut conseiller dès les années 1970.L’ancien patron des députés LR (ex-UMP, ex-RPR), Christian Jacob, a salué “le fidèle grognard de Jacques Chirac, celui qui aura apporté une réelle contribution à la victoire de 1995”.Docteur en droit sans avoir passé le bac, magistrat instructeur puis député (1986), soutien de Jacques Chirac dans sa guerre interne à droite avec Édouard Balladur, il fut nommé ministre de l’Intérieur de 1995 à la dissolution de l’Assemblée nationale de 1997, marquant l’opinion publique par l’évacuation de sans-papiers occupant l’église Saint-Bernard à Paris.Accédant à la présidence de l’Assemblée nationale après la réélection de Jacques Chirac en 2002, y gagna une image plus consensuelle et fut ensuite nommé à la présidence du Conseil constitutionnel (2007-2016).Ses successeurs lui ont rendu hommage, Laurent Fabius mettant en avant “son attachement au service de la République” et Richard Ferrand “son indépendance d’esprit et son humanité”.Parmi de nombreux ouvrages publiés, Jean-Louis Debré raconta son expérience à la tête de l’institution de la rue de Montpensier. Mais aussi ses rapports parfois tendus avec Nicolas Sarkozy, dont le Conseil constitutionnel a, après sa défaite face à François Hollande en 2012, confirmé le rejet des comptes de campagne.-“Voix singulière” et “humour décapant”-Auteur de livres politiques et de romans policiers, familier des planches de théâtre, Jean-Louis Debré -dont le frère jumeau Bernard Debré, professeur urologue réputé et lui aussi député, est décédé en 2020- fut également, pendant plus de vingt ans, député de la première circonscription de l’Eure (Évreux), où lui a succédé Bruno Le Maire en 2007, détenue depuis juillet 2024 par le Rassemblement national.”Ce grand connaisseur et ce grand serviteur de nos institutions aura marqué de ses convictions gaullistes la vie politique française”, a réagi sur X le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau (LR).Marine Le Pen (RN) a salué sur le même réseau social “un homme de tempérament, connu pour son franc-parler et son attachement aux débats”.Les hommages sont également élogieux à gauche, à l’image de l’ex-président (PS) François Hollande qui a mis en avant un homme “passionné, ardent, fiévreux” dans sa défense de Jacques Chirac et de ses “convictions gaullistes”, mais aussi sa “grande capacité d’indépendance”.”Nos débats passionnants et respectueux dépassaient nos divergences”, a souligné le secrétaire national du Parti communiste Fabien Roussel.”Il était de ceux pour qui l’idée républicaine restait un idéal et même davantage qu’une Constitution (…) Sa fidélité à cette attitude nous est léguée comme un exemple”, a réagi sur X le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon.Homme de tempérament, connu pour son franc-parler et son attachement aux débats, il fut et demeurera une personnalité du paysage politique et institutionnel.

Soupçons de corruption à Fréjus: la mairie RN de David Rachline perquisitionnée

Un haut responsable RN dans les rets de la justice financière : la mairie de Fréjus (Var) de David Rachline, directeur de la campagne présidentielle 2017 de Marine Le Pen et qui doit être jugé en septembre pour prise illégale d’intérêts, est perquisitionnée mardi dans une enquête pour corruption autour des marchés publics.Confirmant une information de L’Obs, une source judiciaire a indiqué à l’AFP que “des perquisitions (étaient) en cours depuis ce matin au sein de la mairie de Fréjus et de plusieurs sociétés concernées” par ces marchés, dans le cadre d’une enquête préliminaire ouverte en janvier 2024 par le Parquet national financier (PNF).La source judiciaire a précisé que l’enquête avait été ouverte à la suite des révélations du livre “Les Rapaces” (éditions Les Arènes) de la journaliste Camille Vigogne Le Coat, publié en novembre 2023 et mettant sévèrement en cause M. Rachline pour sa gestion de la commune varoise.”La justice suit son cours dans le cadre d’une procédure classique, déclenchée par une série d’articles fallacieux et la publication d’un ouvrage militant à charge contre David Rachline, sans fondement”, a commenté la mairie dans un communiqué.Selon la source judiciaire, les opérations de mardi sont “réalisées par 40 gendarmes de la section de recherches de Marseille, en présence d’un magistrat et d’un assistant spécialisé du PNF”. “Aucune garde à vue n’est en cours”, a encore indiqué cette source.Cité balnéaire de 56.000 habitants, Fréjus a été pendant des années érigée en vitrine du projet lepéniste, le parti y organisant souvent ses rentrées politiques.Ex-sénateur, David Rachline, conseiller municipal à 20 ans puis maire depuis 2014 de la commune varoise, a dirigé le Front national de la jeunesse ou encore la première campagne présidentielle de Marine Le Pen qui l’a amenée au second tour, en 2017.Selon l’organigramme en ligne du parti d’extrême droite, il en est toujours 2e vice-président et membre de sa plus haute instance, le bureau exécutif.”Je ne crois pas un mot de ce qui est écrit”, avait déclaré à la sortie du livre Sébastien Chenu, vice-président du RN, mettant en avant un maire “très bien jugé” par les électeurs.- “Inventions” -Des enveloppes d’argent liquide sur fond de marchés publics truqués: le livre “Les rapaces”, qui se veut une “enquête sur la mafia varoise de Marine Le Pen”, dénonçait le train de vie de l’édile, sans rapport selon la journaliste avec ses indemnités d’élu.Il l’accusait aussi d’arrangements avec un puissant entrepreneur local de BTP pour l’attribution de marchés publics, loin de l’image d’exemplarité véhiculée par le parti, et relayait des soirées arrosées du maire où fuseraient remarques racistes et gestes antisémites. D’après la journaliste, qui travaille pour L’Obs et qui a également révélé mardi ces perquisitions, “le géant local du BTP Alexandre Barbero, à la tête de sa Holding Delta Investissements (HDI)” est visé par l’enquête.Il a noué “une relation de très grande proximité avec David Rachline et jouit d’une position quasi hégémonique sur les chantiers de l’Est Var”, assure Mme Vigogne Le Coat.L’AFP n’a pu confirmer auprès d’une source judiciaire ou proche du dossier qu’HDI était visé par les opérations.A la sortie du livre, M. Rachline avait évoqué “de pures inventions relayées par d’anciens collaborateurs éconduits et opposants politiques” et son avocat Alexandre Varaut avait annoncé une plainte en diffamation. “Face à ces attaques récurrentes, David Rachline demeure serein et confiant. Il reste persuadé que la procédure en cours confirmera à nouveau sa bonne foi, son honnêteté et sa probité”, a maintenu mardi le communiqué de la mairie.M. Rachline est cependant convoqué pour être jugé pour prise illégale d’intérêts le 30 septembre devant le tribunal correctionnel de Draguignan, concernant les conditions de sa nomination à la tête des deux sociétés d’économie mixte, Fréjus Aménagement et Gestion du port de Fréjus.

Commission d’enquête : Coquerel (LFI) annonce saisir la justice après le refus de Kohler d’être auditionné

Le député Eric Coquerel (LFI) a annoncé mardi qu’il saisirait “dès ce jour” le procureur de la République pour demander des poursuites contre le secrétaire général de l’Élysée Alexis Kohler, après son nouveau refus d’être auditionné devant une commission d’enquête sur les raisons du dérapage des finances publiques.”J’ai donné une dernière chance à Monsieur Kohler pour se présenter devant notre commission puisqu’il en a l’obligation. Il vient de me répondre à l’instant que ce ne sera pas le cas. Donc je vais évidemment entamer dès ce jour une poursuite devant le procureur de la République”, a annoncé M. Coquerel, président de cette commission d’enquête, lors d’une conférence de presse à l’Assemblée.”Certains diront qu’il a peut-être des choses à cacher. Je ne suis même pas sûr que ça soit l’élément fondamental. L’élément fondamental ? C’est que ces gens-là pensent qu’ils n’ont pas de comptes à rendre au Parlement. Je rappelle que Monsieur Kohler n’est pas le président de la République”, a poursuivi le député de Seine-Saint-Denis devant des journalistes.La commission des Finances de l’Assemblée, présidée par Eric Coquerel, a obtenu pour six mois les pouvoirs d’une commission d’enquête et lancé ses travaux début décembre pour enquêter sur “les causes” de “la variation” et des “écarts des prévisions fiscales et budgétaires” constatés sur les années 2023 et 2024.Alexis Kohler, bras droit du président Emmanuel Macron, n’a pas répondu à la convocation de la commission invoquant des problèmes d’agenda, puis “le principe de séparation des pouvoirs”, selon différents courriers adressés à Eric Coquerel et consultés par l’AFP, dont le dernier est daté du 3 mars.Le secrétaire général de l’Elysée y invoque à nouveau “le principe de séparation des pouvoirs” entre l’exécutif et le législatif, pour justifier le fait qu’un collaborateur du président de la République puisse refuser d’être auditionné devant une commission d’enquête, estimant qu’une telle audition risquerait de “porter atteinte aux principes constitutionnels qui encadrent le fonctionnement de nos institutions”.Selon une ordonnance du 17 novembre 1958, toute personne dont une commission d’enquête a jugé l’audition utile est tenue de déférer à la convocation qui lui est délivrée. La personne qui ne comparaît pas ou refuse de déposer ou de prêter serment devant une commission d’enquête est passible de deux ans d’emprisonnement et de 7.500 euros d’amende.M. Kohler s’est déjà présenté devant des commissions d’enquête, en 2019 sur l’affaire Benalla au Sénat, ou en 2020 sur les concessions d’autoroute, toujours à la chambre haute.

Jean-Louis Debré, porte-flingue de Chirac devenu sage de la République

Considéré un temps comme le vilain petit canard de son illustre famille, grognard de la chiraquie d’abord associé à la droite dure, Jean-Louis Debré, décédé mardi à l’âge de 80 ans, s’était imposé comme un sage de la République, à la parole émancipée.Sa fidélité sans faille à Jacques Chirac lui a valu d’obtenir les postes les plus en vue: le ministère de l’Intérieur en 1995 dès l’arrivée à l’Elysée de son mentor, la présidence stratégique du groupe RPR à l’Assemblée après la dissolution ratée de 1997, le perchoir du Palais-Bourbon (2002-2007) remporté au nez et à la barbe d’Edouard Balladur et, récompense suprême, la présidence de 2007 à 2016 du Conseil constitutionnel, institution qu’il a profondément modernisée.- “Fidèle, républicain et libre” -“C’est un politique jusqu’au bout des ongles”, décrivait le président des Hauts-de-France Xavier Bertrand.Mais aussi “un homme fidèle, républicain et libre”, résumait récemment pour l’AFP l’ancien président de la République socialiste François Hollande. Les deux hommes ont longtemps bataillé ferme avant d’entretenir des relations d’estime mutuelle.Après avoir quitté la rue de Montpensier et retrouvé sa liberté de parole, dont il use dès lors pleinement, Jean-Louis Debré révèle même avoir voté Hollande en 2012 face à Nicolas Sarkozy, son ennemi intime, “homme de clan” sans “aucun sens de l’Etat” à ses yeux. “Sarkozy et moi, ça n’a jamais collé…”, soufflait-il.Né le 30 septembre 1944 à Toulouse, Jean-Louis Debré est issu d’une famille éminente. Son père Michel, résistant, rédigera la Constitution de la Ve République en 1958 et sera Premier ministre du général de Gaulle. Le grand-père Robert a fondé la pédiatrie moderne et est à l’origine des CHU et l’arrière-grand-père Simon a failli être grand rabbin de France.Il a trois frères dont un jumeau, Bernard, chirurgien urologue réputé, député et ministre, décédé en 2020. Son faux jumeau à tous égards: Bernard hérite du fief politique familial d’Amboise quand Jean-Louis, dans l’ombre envahissante de leur père et moins charismatique, doit conquérir seul sa place au soleil, dans l’Eure. Et lors de la guerre Chirac-Balladur, les frères sont dans des camps opposés, Bernard choisissant Balladur.Magistrat, Jean-Louis Debré se lance définitivement en politique en 1986, dans le sillage de Chirac bien sûr.Avec qui il a des relations quasi filiales – lui restant fidèle jusqu’à la mort – mais empreintes de franchise. “Chirac, je l’adore, je l’aime. Mais je suis aussi lucide sur le personnage” à qui il est l’un des seuls à pouvoir dire “des choses désagréables en privé”.Ministre de l’Intérieur, il doit faire face à la série d’attentats islamistes à l’été 1995 et devient la bête noire de la gauche et des caricaturistes après l’expulsion musclée en 1996 de centaines de sans-papiers occupant l’église Saint-Bernard à Paris.Après 2002, changement radical: au perchoir, la gauche découvre “un vrai républicain”, une “personnalité originale”, “pas sectaire”, qui “défend les droits de l’opposition” au grand dam de la droite, résume pour l’AFP Jean-Marc Ayrault, alors patron des députés PS.- Ecrivain prolifique -Veuf, père de trois enfants, il a toujours aimé écrire: des romans policiers comme “Quand les brochets font courir les carpes” mais aussi un “Dictionnaire amoureux de la République” ou une galerie de femmes pionnières, “Ces femmes qui ont réveillé la France”, qu’il adapte au théâtre en montant sur les planches en 2021 avec sa nouvelle compagne Valérie Bochenek.En privé, il montre aussi des talents de conteur et d’imitateur. Narrant avec délectation la haine inextinguible entre Valéry Giscard d’Estaing et Jacques Chirac, amenés en 2007 à siéger ensemble parmi les Sages.Ces dernières années, l’homme, toujours à l’affût d’un bon mot, était devenu chroniqueur à la radio et à la télévision.Sans filtre, il aimait décocher ses flèches, notamment contre ces “politiques à bout de souffle”. Mais aussi prodiguer des conseils. Ainsi proposait-il en 2023 qu’Emmanuel Macron, pour qui il a voté dès 2017, ait recours au “référendum” ou à “la dissolution”. Vraisemblablement sans imaginer être pris au mot…

Suspension de l’aide à l’Ukraine: la décision de Trump est une “trahison” selon Edouard Philippe

La décision de Donald Trump de suspendre l’aide militaire à l’Ukraine est “une trahison” qui vient après “une embuscade”, a dénoncé mardi l’ancien Premier ministre Edouard Philippe.”L’épisode qui s’est passé dans le bureau du président des Etats-Unis était une embuscade et la décision américaine est une trahison”, a jugé M. Philippe sur France inter.”Abandonner un pays qu’on soutient, qui est agressé, travestir la vérité au point de dire que la guerre serait le fait de l’Ukraine, évidemment, c’est une trahison”, a-t-il renchéri. Edouard Philippe juge qu’il “faut désormais passer à une étape supérieure” à l’égard de la Russie et faire en sorte que les actifs russes gelés “soient mis totalement à la disposition” de l’effort de guerre ukrainien.Les pays de l’Union européenne utilisent déjà les profits dégagés par les avoirs russes gelés afin d’aider à armer l’Ukraine et à financer sa reconstruction d’après-guerre, une manne représentant entre 2,5 et 3 milliards d’euros par an.En revanche, l’option d’une saisie des avoirs russes eux-mêmes a jusqu’ici été écartée, essentiellement pour des raisons d’ordre juridique.M. Philippe souhaite également utiliser “les crédits européens non dépensés dans des politiques publiques européennes” pour les “consacrer à l’effort de défense”.

Ukraine: devant l’Assemblée, Bayrou dénonce la “brutalité” de Trump et loue “l’honneur” de Zelensky

François Bayrou a dénoncé lundi la “brutalité” de Donald Trump face à Volodymyr Zelensky, lors d’un débat à l’Assemblée nationale sur l’Ukraine et la sécurité en Europe, pour laquelle la France doit, selon lui, jouer “un rôle central”.Revenant sur l’altercation dans le Bureau ovale de la Maison Blanche, le Premier ministre a évoqué “une scène sidérante, marquée de brutalité, de volonté d’humiliation” du président ukrainien. Lequel “n’a pas plié” et dont “l’honneur” mérite “reconnaissance”, a-t-il ajouté, applaudi par les députés.Depuis l’invasion russe de 2022, “nous avons basculé dans un autre monde”. Et avec le revirement américain, “c’est à nous, Européens, de garantir la sécurité et la défense de l’Europe”, a-t-il lancé.Car sur le Vieux continent, “nous sommes forts et nous ne le savons pas. Et nous nous comportons comme si nous étions faibles”, a ajouté le chef du gouvernement.”La France peut jouer dans l’édification de ce nouveau monde, de ce nouvel équilibre, un rôle central, mais elle ne le fera que si elle recouvre sa confiance et son unité”, a conclu François Bayrou.Annoncés mi-février, ces débats — sans vote — prennent une nouvelle dimension après l’altercation de vendredi dans le Bureau ovale, et le sommet de leaders européens dimanche à Londres.- “Instinct capitulard” -L’ambassadeur d’Ukraine en France a assisté aux débats depuis les tribunes, de même que l’eurodéputé (Place Publique) Raphaël Glucksmann.Parmi les oratrices des groupes, Marine Le Pen (Rassemblement national), si elle a salué l'”héroïsme” de la résistance ukrainienne face à “l’indéfendable agression russe”, a également évoqué “l’intransigeance occidentale vis-à-vis de la Russie”.”Nous ne pourrons jamais soutenir une chimérique défense européenne”, pas plus que “l’envoi de troupes française combattantes sur le sol ukrainien”, “une folie”, a-t-elle par ailleurs réaffirmé, également opposée au “partage” de la dissuasion nucléaire française avec les Européens.”Personne n’a jamais dit qu’on partagerait, personne. Le mot partager n’a jamais été prononcé”, lui a répondu le ministre des Armées Sébastien Lecornu.L’ancien Premier ministre Gabriel Attal (Renaissance) a, lui, dénoncé “l’instinct capitulard” du RN.Il a par ailleurs demandé l’accélération du processus d’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne” et appelé la France à “reconsidérer (sa) position” sur “les avoir russes gelés”.Deux options que le chef de la diplomatie Jean-Noël Barrot a écartées. La confiscation représenterait un “risque financier trop important” et il n’y a “pas de raccourci possible” pour rejoindre l’UE, a-t-il argué.Le président du groupe socialiste Boris Vallaud a, lui, prôné “un grand emprunt commun de 500 milliards” d’euros en Europe, avec des règles budgétaires “revues”, et demandé en France que la loi de programmation militaire soit “actualisée”.- Plan franco-britannique -Dimanche à Londres, le Premier ministre britannique Keir Starmer a indiqué que le Royaume-Uni et la France travaillaient avec l’Ukraine sur un plan pour “cesser les combats”.Dans Le Figaro, Emmanuel Macron a évoqué une trêve “dans les airs, sur les mers et les infrastructures énergétiques”. A ce stade, ce n’est qu’une “option”, a cependant relativisé Londres lundi matin.Le président français a par ailleurs estimé que l’Union européenne doit mobiliser “200 milliards d’euros dans un premier temps” pour financer l’effort militaire, et que ses 27 membres doivent porter leur effort de défense autour de 3% à 3,5% de leur produit intérieur brut (PIB) contre 2% aujourd’hui.Cette montée en puissance sera à l’ordre du jour d’un sommet jeudi à Bruxelles. – Désaccords sur la table -Une fois n’est pas coutume, le chef de l’Etat peut compter sur l’appui du Parti socialiste, dont le leader Olivier Faure a dit lundi “se retrouver parfaitement” dans ce qu’il propose.A droite, le chef des députés LR Laurent Wauquiez a jugé dimanche “indispensable de parler” avec Vladimir Poutine pour “restaurer la paix”.Un rare point commun avec le numéro un du Parti communiste Fabien Roussel, qui ne veut “pas laisser Trump et Poutine discuter ensemble” et “sceller un accord sur le dos des Européens”.La France insoumise avait dénoncé, par la voix de son leader Jean-Luc Mélenchon, la “servilité atlantiste” des dirigeants européens qui ont “diabolisé Poutine”. “Nous voici dans une situation de dépendance à l’égard des Etats-Unis qui est critique, et nous n’en sortirons pas sans une volonté ferme et un plan clair”, a renchéri lundi le député LFI Aurélien Saintoul.

Aurore Bergé veut remplacer le congé parental par un “congé de naissance”

Plus court mais mieux rémunéré: la ministre chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes Aurore Bergé veut “avancer” sur le “congé de naissance” afin de remplacer dès l’année prochaine l’actuel congé parental, a-t-elle indiqué lundi à l’AFP.Annoncée l’an dernier par le président Emmanuel Macron, la mise en place du congé de naissance avait été suspendue à la suite de la dissolution de l’Assemblée nationale. “Je souhaite évidemment qu’on avance”, “nous allons continuer à travailler de manière, j’espère, à ce qu’il soit effectif l’année prochaine”, a indiqué la ministre, à l’approche du 8 mars, journée internationale des droits des femmes.Ce congé de “quatre mois par parent”, à prendre après le congé maternité ou paternité si souhaité, bénéficierait d’une “bien meilleure indemnisation” que le congé parental actuel, qui permet de toucher environ 400 euros mensuels.Ce nouveau congé permettrait “d’éviter que la parentalité ne pèse que sur les femmes”, qui sont bien plus nombreuses que les hommes à prendre un congé parental, a souligné Aurore Bergé. Le projet doit faire l’objet de discussions avec les partenaires sociaux, avant de pouvoir éventuellement être intégré au prochain Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS).Pour favoriser l’égalité économique au sein des couples, à partir de septembre, le gouvernement va “appliquer par défaut un taux individualisé pour le calcul de l’impôt sur le revenu”, a également indiqué Aurore Bergé. A l’heure actuelle, un taux moyen est appliqué automatiquement, ce qui est désavantageux pour celui — ou le plus souvent celle — qui gagne moins.Autres chantiers prioritaires du gouvernement: la santé des femmes et la lutte contre les violences.”La première cause de mortalité féminine, ce sont les maladies cardiovasculaires”, rappelle Aurore Bergé, qui souhaite lancer cette année “une campagne de sensibilisation, notamment vers les professionnels de santé”. Le gouvernement travaille aussi sur un projet de “bus itinérants”, dédiés à la prévention de maladies gynécologiques et cardiovasculaires, pour les zones où manquent les professionnels de santé.En matière de lutte contre les violences, le gouvernement poursuit notamment le déploiement des téléphones grave danger, qui permettent en cas de besoin d’alerter les forces de l’ordre via une touche spéciale: “près de 6.500” sont actuellement déployés. 

Défense européenne, dissuasion… Faure “se retrouve parfaitement” avec Macron

Le leader du Parti socialiste Olivier Faure “se retrouve parfaitement” avec ce que propose Emmanuel Macron sur la défense européenne et la dissuasion face à la nouvelle donne créée en Europe par la politique de Donald Trump.”Je me retrouve parfaitement dans ce qui a été énoncé par le chef de l’État. Ce n’est pas parce que je suis dans l’opposition que je suis pavlovien. Quand je suis en accord, je le dis aussi”, a déclaré lundi M. Faure sur Franceinfo.M. Faure, qui se rendra à Bruxelles jeudi pour rencontrer les responsables socialistes européens qui se réunissent en amont du sommet consacré à la défense, défendra “une position claire”: “faire bloc avec les Ukrainiens et, à moyen terme, s’engager dans une défense européenne dans laquelle les Français doivent prendre toute leur part, y compris en reposant la question du parapluie nucléaire”.Emmanuel Macron a proposé d’ouvrir un dialogue avec d’autres pays européens sur la dissuasion nucléaire française et veut également une montée en puissance de la défense européenne avec une hausse des dépenses militaires.”Il faut aller sur ce terrain là, il faut répondre à l’appel de (Friedrich) Merz, le futur chancelier allemand. Il y a quelque chose qui peut permettre d’avancer là où les Européens jusqu’ici, ont bloqué”, a ajouté M. Faure.Devant le spectaculaire rapprochement des Etats-Unis de Donald Trump avec la Russie, Friedrich Merz a jugé nécessaire que l’Europe se prépare “au pire scénario” d’une Otan dépourvue de la garantie de sécurité américaine, y compris nucléaire.”Quand on dit qu’il faut que le parapluie ait d’autres frontières que les nôtres, ça ne veut pas dire que la décision ne resterait pas dans les mains du seul président français. Parce que, dans ces moments là, il faut pouvoir réagir seul et vite”, a souligné M. Faure.Mais “il faut aussi obtenir que les dépenses de défense que nous faisons pour nous mêmes mais aussi pour l’ensemble du continent européen puissent être sorties” de la règle européenne limitant le déficit budgétaire à 3% du PIB.Pour financer cet effort, M. Faure suggère de puiser dans les avoirs russes gelés alors que pour l’instant l’UE se contente de récupérer les intérêts générés par ces avoirs.

Ukraine, défense: le RN vivement critiqué par Macron et la gauche

Le Rassemblement national, qui a réaffirmé lundi son hostilité à une défense européenne et au “partage” de la dissuasion nucléaire, est sous le feu des critiques des socialistes et d’Emmanuel Macron, qui accuse Marine Le Pen d'”amateurisme”.”Ces sujets ne souffrent pas d’amateurisme”, a lancé le chef de l’Etat dans un entretien au Figaro, à l’adresse de la cheffe de file de l’extrême droite. Elle avait vivement réagi à sa proposition d'”ouvrir la discussion” sur une dissuasion nucléaire à l’échelle européenne, après l’affrontement verbal entre Volodymyr Zelensky et Donald Trump vendredi à Washington, qui a renforcé les doutes sur l’engagement de Washington sur le Vieux continent. “Mme Le Pen n’est pas sérieuse. Sinon, elle ou M. Bardella seraient venus à la réunion au format Saint-Denis que j’ai faite la semaine dernière avec les partis. L’un était à Washington pour découvrir que M. Steve Bannon (ex-conseiller de M. Trump, NDLR) faisait des saluts nazis. Quant à Mme Le Pen, je comprends qu’elle était en vacances…”, a-t-il ajouté.”Partager le bouton nucléaire avec des Etats européens” relèverait d’une “trahison nationale”, a appuyé lundi sur RTL le président du RN Jordan Bardella.”Je pense qu’il faut que la France retrouve la voie d’une diplomatie libre, indépendante et qu’elle retrouve surtout des capacités de défense”, a-t-il appuyé.Le gouvernement a insisté de son côté, pendant le week-end, sur le fait que la décision d’usage du feu nucléaire resterait exclusivement celle du président français, même si un dialogue était engagé avec d’autres Européens.De son côté, l’ex-président François Hollande a aussi attaqué Marine Le Pen sur son positionnement, à la fois sur Donald Trump et Vladimir Poutine.”Marine Le Pen (…) est à la fois liée à Donald Trump et liée à Vladimir Poutine. Donc je comprends qu’elle soit assez satisfaite de ce qui se passe aujourd’hui”, a-t-il commenté sur France Inter.”Ce sont ses deux parrains et ses deux références qui se trouvent aujourd’hui en train de discuter ensemble”, a-t-il poursuivi, appelant “à une prise de conscience politique qui doit nous permettre, en 2027, d’écarter” Marine Le Pen, “l’amie des deux partenaires qui sont prêts à dépecer l’Ukraine”.Le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure s’est interrogé sur la perception qu’a eue Marine Le Pen de l’altercation entre les présidents américain et ukrainien dans le Bureau ovale.”Personne n’a trouvé ça normal à part Marine Le Pen. Je suis désolé de constater qu’elle est la seule à avoir cette vision là des choses”, a-t-il dit sur franceinfo.”Que des dirigeants de nations puissent se parler avec passion, qu’il puisse y avoir des frictions, qu’il puisse y avoir des mots durs, après tout, c’est assez normal”, avait estimé Marine Le Pen samedi.