La ministre de l’Agriculture Annie Genevard a défendu jeudi sa stratégie de lutte contre l’épizootie de dermatose des bovins lors d’un déplacement en Savoie et Haute-Savoie, où plus d’un millier de bêtes ont été euthanasiées depuis fin juin.Il s’agit d”‘une maladie extrêmement dangereuse par sa contagiosité et la force du virus”, a-t-elle déclaré à l’issue d’une “réunion de crise” à Chambéry avec des représentants des éleveurs, élus et autorités des deux départements, relevant un “risque que cela emporte l’ensemble de la filière bovine française” si elle n’était pas enrayée.Le protocole de lutte mis en place, “sur lequel personne n’a émis de réserve scientifique, en tout cas pas dans les organismes de référence”, repose sur l’euthanasie des troupeaux où des cas ont été décelés, la vaccination prévue de quelque 310.000 bovins à ce stade et la biosécurité, c’est-à -dire le fait que les animaux ne soient pas déplacés.Le premier cas a été signalé le 29 juin et, en date du 24 juillet, 37 foyers ont été détectés en Savoie et Haute-Savoie, selon le ministère. A ce jour, quelque 1.500 bêtes, pour 33 troupeaux, ont été euthanasiés, selon Christian Convers, secrétaire général de la Coordination rurale et éleveur en Savoie.Ces mesures dites de “dépeuplement” ont suscité une vive émotion dans les zones touchées où certains éleveurs ont tenté plusieurs jours durant de bloquer l’accès à leurs exploitations pour empêcher l’abattage.Une cinquantaine d’éleveurs et leurs sympathisants se sont rassemblés tôt jeudi devant la préfecture de Savoie pour dénoncer le “massacre” de leurs bêtes et appeler à un abattage “sélectif” des animaux malades afin d’assurer la survie de leurs exploitations. “Genevard, t’arrives trop tard!”, ont-ils scandé, emmenés par deux syndicats, la Confédération paysanne et la Coordination rurale.”On est plus pertinent à être ici [dans la rue] que d’être à l’intérieur pour cautionner un cirque qui encore une fois va amener juste à valider quelque chose qui a été décidé dans les bureaux parisiens”, s’est indigné Stéphane Galais, porte-parole de la Confédération paysanne. “Là il y a la vaccination: est-ce qu’elle va continuer à tuer les vaches ? C’est ça la question”, a-t-il insisté.- “Tout le monde a peur” -Une vingtaine d’autres manifestants était également présents à proximité de la ferme haut-savoyarde où s’est ensuite rendue la ministre, brandissant des pancartes proclamant “Vous êtes des assassins”.Cet élevage de Hauteville-sur-Fier, près d’Annecy, qui fournit du lait destiné à l’emmental et la raclette, a commencé dès dimanche à vacciner ses vaches. Désormais, “le compte à rebours est déclenché. On sait que d’ici le 10-12 août, notre troupeau sera hors de danger. Mais voilà , il reste ces deux semaines où le risque est encore majeur”, a souligné l’exploitant, Denis Tranchant. Pour l’heure, “tout le monde a peur”, et “humainement, c’est très dur”, a-t-il souligné, très ému.Selon lui, le danger pesant sur la filière bovine française est “réel” et “on ne peut pas bâtir un après-crise sur des reproches”. Il s’est déclaré “prêt sans hésitation” à l’avenir à céder des bêtes aux éleveurs devant reconstituer leur cheptel après la crise.La DNC, qui affecte bovins, buffles et zébus, se transmet par piqûres d’insectes qui agissent comme des “seringues volantes et transmettent la maladie de proche en proche,”, a expliqué à l’AFP Éric Cardinale, directeur scientifique de la santé animale à l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Elle n’est en revanche pas transmissible à l’humain, ni par contact avec des bovins infectés, ni par l’alimentation, ni par piqûres d’insectes. La ministre a également rendu “hommage aux éleveurs qui ont accepté, dans un esprit citoyen et pour protéger l’ensemble des élevages”, que leurs troupeaux, affectés par la maladie, soient abattus, indiquant avoir rencontré quatre d’entre eux jeudi matin. “Ils ont été contraints au sacrifice ultime: faire abattre leurs bêtes. Ce sont eux, les héros silencieux de cette crise. Ils permettent de sauver toute la filière”, a-t-elle dit, assurant que l’indemnisation “se déploierait rapidement” et serait “à la hauteur du préjudice qui a été consenti”.