Dans les quartiers populaires, le “calvaire” quotidien des pannes d’ascenseurs

L’un des deux ascenseurs fonctionne. Mais il ne dessert pas l’étage où habite Chrislie Mouthoud, qui doit tous les jours porter ses deux petites filles pour rejoindre son appartement dans l’immense copropriété dégradée de Grigny 2 (Essonne).Tous les jours, cette auxiliaire de crèche de 43 ans doit prendre l’ascenseur jusqu’au 11e étage et redescendre à pied jusqu’au 6e avec ses jumelles. Souvent aidée par sa mère de 70 ans.Mme Mouthoud vit le “calvaire” décrit par le député Philippe Brun (PS) dans la proposition de loi qu’il porte pour lutter contre les pannes d’ascenseurs – 1,5 million par an selon le parlementaire.En mai 2023, après un accident mortel, l’ascenseur est immobilisé pour les besoins de l’enquête. “Cela a eu pour conséquence une pression énorme sur (celui) qui fonctionnait, et une accélération de sa dégradation”, détaille la direction de l’aménagement, de l’habitat et du renouvellement urbain de la mairie.Quand l’AFP se rend dans cet immeuble, le seul ascenseur fonctionnel ne dessert que les onzième et treizième étages.Locataire dans cette tour qui fait l’objet d’une opération de requalification en logements sociaux, Mme Mouthoud se sent “abandonnée”.- “Bras de fer” -Pour pallier les problèmes, des travaux d’urgence financés par l’Etat ont été réalisés et la municipalité a mis en place un service de portage de courses.”On essaye de fluidifier les informations entre les habitants, le conseil syndical, l’administrateur provisoire (nommé par le tribunal pour administrer les copropriétés en grave difficulté, ndlr), l’établissement public foncier d’Île-de-France (pilote du projet de redressement des copropriétés de Grigny 2) et l’ascensoriste”, indique encore la mairie. Mais “c’est un bras de fer constant entre les ascensoristes et les gestionnaires d’immeubles”, déplore-t-elle, et “la réactivité n’est pas là” dans les échanges avec Otis, en charge de l’entretien. Sollicitée, l’entreprise n’a pas répondu aux questions de l’AFP.Le problème ne se limite pas aux copropriétés dégradées: selon la Fédération des ascenseurs, le parc national est vétuste. Un quart des appareils ont plus de 40 ans et 40% ont dépassé les 25 ans. “La vraie problématique, elle est sur ces appareils vétustes sur lesquels vous n’avez pas les pièces”, détaille son président Olivier Rouvière, “des pièces qui ont presque 40 ans, allez les trouver sur le marché, c’est comme réparer une 4L”.Chez Marie-Pierre Gay, qui habite dans l’une des rares tours de Thiais (Val-de-Marne), l’ascenseur n’a pas été changé depuis son emménagement… en 1983.”Les pannes c’est récurrent”, soupire cette retraitée de 63 ans, dont le mari est décédé après un malaise cardiaque en juillet 2023. Une équipe du Samu, appelée à l’aide, était restée bloquée dans l’ascenseur. “Je ne peux pas certifier qu’ils l’auraient sauvé, mais je me dis que s’il avait été transporté (à l’hôpital) tout de suite, peut-être qu’il serait encore là”, confie-t-elle les larmes aux yeux.  Contacté, l’opérateur Schindler indique que des travaux “de modernisation et de mise aux normes de l’installation” étaient prévus courant 2025.- Vandalisme -Marie-Pierre Gay demande aussi une compensation financière à son bailleur et conteste un premier versement de 22,34 euros versé à chacun des 84 locataires, insuffisant selon elle pour une panne d’un mois.Lorsqu’ils sont interrogés, sans éluder la question des pièces manquantes, les bailleurs mettent en avant l’insécurité et le vandalisme, qui justifie selon eux jusqu’à deux tiers des interventions.”Qu’on demande des comptes aux bailleurs, c’est normal”, affirme Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union sociale pour l’habitat. “Mais (…) aujourd’hui ce qu’on subit, c’est des difficultés à faire intervenir les entreprises”.”Il y a du vandalisme comme partout”, balaye Noha Tefrit, assistante parlementaire de Philippe Brun à l’origine du collectif Ascenseurs en colère.Selon elle, les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) comme ceux de Marie-Pierre Gay et Chrislie Mouthoud sont “un peu laissés à l’abandon” et bénéficient de contrats de moins bonne qualité.Les ascensoristes, eux, estiment que la proposition de loi visant à les pénaliser en cas de dépassement du délai de réparation est “punitive” et risque “d’augmenter par cinq le prix des contrats dans l’habitat social”.Elle obligerait également le propriétaire d’un immeuble à assurer l’accompagnement des occupants à mobilité réduite.Aujourd’hui, face aux problèmes, à Grigny par exemple, “on bricole pour parer aux urgences”, glisse-t-on à la mairie.
L’un des deux ascenseurs fonctionne. Mais il ne dessert pas l’étage où habite Chrislie Mouthoud, qui doit tous les jours porter ses deux petites filles pour rejoindre son appartement dans l’immense copropriété dégradée de Grigny 2 (Essonne).Tous les jours, cette auxiliaire de crèche de 43 ans doit prendre l’ascenseur jusqu’au 11e étage et redescendre à pied jusqu’au 6e avec ses jumelles. Souvent aidée par sa mère de 70 ans.Mme Mouthoud vit le “calvaire” décrit par le député Philippe Brun (PS) dans la proposition de loi qu’il porte pour lutter contre les pannes d’ascenseurs – 1,5 million par an selon le parlementaire.En mai 2023, après un accident mortel, l’ascenseur est immobilisé pour les besoins de l’enquête. “Cela a eu pour conséquence une pression énorme sur (celui) qui fonctionnait, et une accélération de sa dégradation”, détaille la direction de l’aménagement, de l’habitat et du renouvellement urbain de la mairie.Quand l’AFP se rend dans cet immeuble, le seul ascenseur fonctionnel ne dessert que les onzième et treizième étages.Locataire dans cette tour qui fait l’objet d’une opération de requalification en logements sociaux, Mme Mouthoud se sent “abandonnée”.- “Bras de fer” -Pour pallier les problèmes, des travaux d’urgence financés par l’Etat ont été réalisés et la municipalité a mis en place un service de portage de courses.”On essaye de fluidifier les informations entre les habitants, le conseil syndical, l’administrateur provisoire (nommé par le tribunal pour administrer les copropriétés en grave difficulté, ndlr), l’établissement public foncier d’Île-de-France (pilote du projet de redressement des copropriétés de Grigny 2) et l’ascensoriste”, indique encore la mairie. Mais “c’est un bras de fer constant entre les ascensoristes et les gestionnaires d’immeubles”, déplore-t-elle, et “la réactivité n’est pas là” dans les échanges avec Otis, en charge de l’entretien. Sollicitée, l’entreprise n’a pas répondu aux questions de l’AFP.Le problème ne se limite pas aux copropriétés dégradées: selon la Fédération des ascenseurs, le parc national est vétuste. Un quart des appareils ont plus de 40 ans et 40% ont dépassé les 25 ans. “La vraie problématique, elle est sur ces appareils vétustes sur lesquels vous n’avez pas les pièces”, détaille son président Olivier Rouvière, “des pièces qui ont presque 40 ans, allez les trouver sur le marché, c’est comme réparer une 4L”.Chez Marie-Pierre Gay, qui habite dans l’une des rares tours de Thiais (Val-de-Marne), l’ascenseur n’a pas été changé depuis son emménagement… en 1983.”Les pannes c’est récurrent”, soupire cette retraitée de 63 ans, dont le mari est décédé après un malaise cardiaque en juillet 2023. Une équipe du Samu, appelée à l’aide, était restée bloquée dans l’ascenseur. “Je ne peux pas certifier qu’ils l’auraient sauvé, mais je me dis que s’il avait été transporté (à l’hôpital) tout de suite, peut-être qu’il serait encore là”, confie-t-elle les larmes aux yeux.  Contacté, l’opérateur Schindler indique que des travaux “de modernisation et de mise aux normes de l’installation” étaient prévus courant 2025.- Vandalisme -Marie-Pierre Gay demande aussi une compensation financière à son bailleur et conteste un premier versement de 22,34 euros versé à chacun des 84 locataires, insuffisant selon elle pour une panne d’un mois.Lorsqu’ils sont interrogés, sans éluder la question des pièces manquantes, les bailleurs mettent en avant l’insécurité et le vandalisme, qui justifie selon eux jusqu’à deux tiers des interventions.”Qu’on demande des comptes aux bailleurs, c’est normal”, affirme Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union sociale pour l’habitat. “Mais (…) aujourd’hui ce qu’on subit, c’est des difficultés à faire intervenir les entreprises”.”Il y a du vandalisme comme partout”, balaye Noha Tefrit, assistante parlementaire de Philippe Brun à l’origine du collectif Ascenseurs en colère.Selon elle, les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) comme ceux de Marie-Pierre Gay et Chrislie Mouthoud sont “un peu laissés à l’abandon” et bénéficient de contrats de moins bonne qualité.Les ascensoristes, eux, estiment que la proposition de loi visant à les pénaliser en cas de dépassement du délai de réparation est “punitive” et risque “d’augmenter par cinq le prix des contrats dans l’habitat social”.Elle obligerait également le propriétaire d’un immeuble à assurer l’accompagnement des occupants à mobilité réduite.Aujourd’hui, face aux problèmes, à Grigny par exemple, “on bricole pour parer aux urgences”, glisse-t-on à la mairie.