Le Canada vit sa première campagne électorale avec l’impossibilité pour les électeurs d’utiliser Facebook ou Instagram pour s’informer via des médias traditionnels. Une situation qui accentue la rupture avec les médias traditionnels et exacerbe l’effet de “chambre d’écho”, estiment les experts.Depuis plus d’un an, le Canada est l’unique pays dans le monde où Meta a bloqué pour tous les utilisateurs les contenus d’actualité. Une mesure qui a été prise pour riposter à une loi canadienne qui oblige les géants du numérique à payer les médias en échange de la diffusion de leurs contenus.De plus en plus de personnes s’informent via les réseaux sociaux et une partie d’entre eux ne sont pas exposés, même de façon périphérique, à la couverture des événements d’actualité par les médias, note Aengus Bridgman, directeur de l’Observatoire canadien de l’écosystème des médias.Une rupture qui peut conduire à “une compréhension de moins en moins large de la politique et à des orientations de plus en plus hyperconcentrées”, craint-il.Cela semble avoir également laissé davantage de place aux influenceurs qui ont pris la place laissée par les médias sur les réseaux sociaux.D’autres pays ont connu un déclin similaire des médias traditionnels mais le blocage des contenus d’actualité au Canada exacerbe le phénomène dans ce pays, estime Chris Arsenault, directeur du programme de journalisme et de communication à l’université Western Ontario.”Cela incite les candidats, et souvent les journalistes citoyens ou les influenceurs, à diffuser leurs messages aux électeurs directement sur les plateformes de médias sociaux”, explique-t-il.- Bulle -Pour les experts, cela expose les citoyens à des informations qui ne proviennent pas forcément de sources de qualité. Mais de leur côté, les influenceurs expliquent vouloir contrer le biais de certains médias.Pour Jasmin Laine, une créatrice de contenu basée au Manitoba, province du centre du pays, les médias traditionnels ont un biais trop critique envers le Parti conservateur du Canada. “Être transparente sur mon point de vue ne signifie pas que je renonce à l’exactitude”, insiste la jeune femme dont les vidéos comptabilisent des centaines de milliers de vues sur Instagram.Elle estime que les utilisateurs sont à la recherche d’angles différents pour s’informer et que les médias traditionnels sont trop prompts à qualifier de “désinformation” le contenu des médias alternatifs.Rachel Gilmore, qui diffuse des reportages indépendants sous forme de vidéos courtes, se réjouit elle de voir les principaux organes de presse utiliser YouTube et TikTok pour informer les électeurs.”Il y a beaucoup de gens qui diffusent des informations et qui ne sont pas nécessairement des journalistes. Certains d’entre eux font un excellent travail, d’autres non, et il est difficile de s’y retrouver”, estime-t-elle.Le grand risque est de s’enfermer dans une bulle: s’informer via des sources secondaires “augmente le risque de se retrouver dans une chambre d’écho si quelqu’un d’autre filtre les nouvelles pour vous”, prévient Angus Lockhart de l’Université métropolitaine de Toronto.Il n’est pas facile de suivre les niveaux de désinformation sur les différentes plateformes, ajoute l’expert, mais la propension à croire des affirmations fausses ou trompeuses semble être associée à une préférence pour les réseaux sociaux comme source d’information.
Wed, 16 Apr 2025 17:24:50 GMT
